POINT FINAL pour la mission d’information de l’Assemblée nationale sur la santé mentale et l’avenir de la psychiatrie. Installés par la commission des affaires sociales en novembre 2012, ses membres ont auditionné près de 200 personnes, 77 heures durant. En réponse au Conseil constitutionnel, qui a jugé inconstitutionnelles deux dispositions du code de la Santé publique introduites en 2011, ils ont d’abord commis en juin 2013 un document d’étape qui a inspiré la loi du 27 septembre 2013 révisant les soins sans consentement.
Avec le rapport de 133 pages remis hier à la ministre de la Santé Marisol Touraine, la mission tire un bilan plus large des dysfonctionnements de l’organisation actuelle de la psychiatrie, et propose 30 recommandations pour y remédier.
Un dispositif innovant mais décevant.
Premier constat, la sectorisation, qui doit permettre une meilleure intégration du patient dans la cité, bénéficiant de soins de proximité, s’avère en deçà de ses promesses. L’accès à une consultation de premier recours se révèle difficile, avec des délais s’étalant sur plusieurs mois, et l’articulation en aval avec le médico-social se heurte à une culture hospitalo-centrée. La prise en charge des soins somatiques est parfois déficiente. L’hétérogénéité des secteurs empêche de garantir l’égalité des soins. Et le principe de l’ancrage territorial laisse de côté les personnes sans domicile stable (précaires, demandeurs d’asile).
Mais plutôt que le désavouer, les parlementaires entendent réaffirmer la pertinence du secteur. Ils suggèrent de fixer par la loi ses missions et de réaffirmer son rôle de proximité en améliorant les relations avec les acteurs environnants : le généraliste, pivot crucial pour diminuer le délai de diagnostic des maladies mentales, la protection maternelle et infantile, la médecine du travail, le service universitaire de médecine préventive, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), les structures médico-sociales, et l’ensemble de l’offre de soins privée.
Les schémas régionaux d’organisation des soins (SROS) élaborés par les agences régionales de santé (ARS) devraient prévoir l’articulation entre le public et le privé, et des délais d’attente maximaux afin d’améliorer l’accessibilité aux centres médico-psychologiques (CMP).
À l’égard des maladies somatiques, la mission parlementaire propose de tisser des conventions entre hôpitaux psychiatriques et généraux et d’inscrire cet objectif dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens. Pour les populations précaires, elle suggère de conforter les politiques intersectorielles en développant les équipes mobiles, en mettant à disposition des logements adaptés, et en renforçant l’insertion professionnelle.
Démocratie sanitaire.
Les députés insistent sur la place centrale que l’usager doit recouvrer dans la psychiatrie en consacrant plusieurs recommandations à la démocratie sanitaire. Ils réaffirment le caractère exceptionnel des pratiques restrictives de liberté (isolement thérapeutique, contention) et demandent une surveillance stricte via le ministère de la santé, les ARS, la commission départementale des soins psychiatriques, et le contrôleur général des lieux de privation de liberté, légitimé à saisir un registre administratif où les établissements consigneraient de telles pratiques. Les parlementaires encouragent la constitution des conseils locaux de santé mentale, des maisons des usagers et des groupes d’entraide mutuelle (GEM).
Ils se montrent aussi soucieux de la prise en charge des troubles psychiatriques en milieu pénitentiaire en demandant le renforcement du temps d’intervention et du nombre de professionnels auprès des détenus, et un meilleur suivi lors de leur sortie.
Enfin, la mission parlementaire insiste sur la nécessaire adaptation des moyens, avec la reconnaissance du rôle des psychologues cliniciens, des infirmiers et des généralistes et sur les besoins en terme de recherche pluridisciplinaire.
Conscient de la multiplicité des rapports préexistants sur le sujet et des plans successifs, le rapporteur Denys Robiliard espère néanmoins que cette dernière somme ne restera pas lettre morte, grâce à l’impulsion donnée par la stratégie nationale de santé. Une personne sur quatre est susceptible de développer un trouble en santé mentale, rappelle-t-il dans son introduction.
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