DE NOTRE CORRESPONDANTE
FIN MARS, tous les foyers d’hébergement ouverts dans le cadre du plan grand froid ont fermé leurs portes. Du jour au lendemain, 500 lits ont été fermés… et autant de sans-abris ont regagné leurs pénates d’été : un bout de carton posé à même le trottoir ou un squatt dans un immeuble en cours de démolition. Parmi eux, beaucoup présentent un état de santé trop précaire pour supporter la vie dans la rue.
« La fermeture a été brutale et nous n’avons pas eu le temps de gérer les situations délicates : les plus atteints ont été envoyés à l’hôtel ou à l’hôpital… en attendant de trouver une solution. Mais la situation se révèle de plus en plus préoccupante », déplore Éric Delhaye, président du SAMU social de Lille.
La métropole lilloise est la plus tendue en matière d’hébergement d’urgence, juste derrière Paris. Et le 115 – deuxième de l’hexagone en nombre d’appels – est complètement saturé. Les familles, considérées comme prioritaires, sont parfois relogées à l’hôtel. Mais les hommes seuls, eux, restent à la rue, avec des pathologies plus ou moins lourdes.
Pour accueillir temporairement ces malades ne relevant plus d’une hospitalisation mais nécessitant cependant des soins, 35 lits halte soin santé ont été créés à Lille. Ils permettent d’assurer les soins et le suivi thérapeutique de personnes souffrant d’un diabète, d’atteintes pulmonaires ou de fractures. « Ces lits sont complètement embouteillés, car occupés par des malades aux pathologies beaucoup plus lourdes que l’on ne peut pas remettre à la rue. Faute d’hébergement à proposer derrière, il n’y a aucun turnover. Et nous devons laisser dehors des sans-abris souffrant de pathologies bénignes mais douloureuses, comme de larges plaies, des fractures non déplacées. La situation n’a jamais été aussi catastrophique », déplore le Dr Christian Matton, permanent à l’ABEJ, une association lilloise qui assure chaque année 3 000 consultations dans son centre de santé.
Pathologies lourdes.
La rue est de plus en plus violente et les personnes hébergées par l’association très abîmées : « Beaucoup présentent des séquelles de traumatismes crâniens ou d’accidents cérébraux et ne peuvent se soigner correctement en raison de troubles cognitifs importants. Certaines se font aussi sévèrement tabasser et arrivent chez nous avec des plaies multiples. »
L’application de la T2A dans les hôpitaux n’a pas arrangé les choses : les centres hospitaliers travaillent désormais en flux tendus et programment des sorties de plus en plus précoces. « Pour les fractures de la jambe, les malades quittent l’hôpital dès qu’ils ont un appui. Quant aux tuberculeux, ils sont renvoyés à la rue après quinze jours de traitement. Au début ils viennent chaque jour chercher leur traitement à l’association, mais abandonnent assez vite, au risque de redevenir contagieux », constate le généraliste lillois, qui cite quelques cas extrêmes, comme cet homme souffrant d’une pyélonéphrite renvoyé à la rue après vingt-quatre heures aux urgences et une nuit passée à l’Armée du Salut ! Ou ce patient souffrant d’un cancer métastasé et sous morphine. Laissé à la rue également.
Depuis 2009, l’ABEJ abrite à titre expérimental une quinzaine de lits d’accueil médicalisé, destinés aux personnes souffrant de pathologies lourdes de pronostic plus ou moins sombre : cancéreux, traumatisés crâniens, personnes en soins palliatifs… Ces lits répondent à un vrai besoin mais sont eux aussi complètement saturés. La liste d’attente est longue pour espérer y être admis.
Le SAMU social comme l’ABEJ dénoncent touts deux une situation catastrophique. « Tous les jours, nous laissons 200 personnes à la rue. »
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