Tout en renouvelant leur opposition absolue à toute forme d’euthanasie, ainsi qu’au suicide médicalement assisté, les médecins allemands ont été forcés, pour des raisons légales, d’assouplir leur code de déontologie pourtant très strict sur ce point.
Organisé cette année en ligne, le Congrès des médecins allemands réunit 250 délégués élus, dont ceux des Ordres régionaux, et définit notamment la politique professionnelle et l’éthique des 402 000 médecins en activité. Largement dominé par la gestion de la pandémie, il s’est achevé par un débat et un vote sur le suicide assisté. Le code de déontologie interdit à tout médecin de fournir à quiconque une aide au suicide, un point qui fait globalement consensus.
Or, le 26 février 2020, la Cour constitutionnelle fédérale a jugé inconstitutionnel l’article du Code pénal qui faisait de l’aide « professionnelle » au suicide un délit en invoquant, au nom de l’autonomie individuelle, le droit au suicide quelle qu’en soit la manière. Bien que cet arrêt n'ait pas concerné directement des médecins, il rend inconstitutionnel l’article du code de déontologie interdisant cette aide. Afin d’éviter un conflit juridique sans issue, les délégués du Congrès ont donc choisi, à 90 %, de le supprimer.
Le code de déontologie, même révisé, reste un bouclier
Toutefois, les médecins ont rédigé et adopté de nouvelles dispositions qui seront prochainement transcrites dans le code de déontologie : aucun médecin ne pourra être forcé d’assister un patient dans sa demande de suicide. En outre, comme il le fait depuis des années, le Congrès réclame une meilleure information des patients sur les alternatives au suicide assisté et, plus globalement, une politique de prévention du suicide.
Comme l’a rappelé le président de l’Ordre fédéral, le Dr Klaus Reinhardt, « aider les patients à mettre fin à leurs jours ne fait pas partie des missions des médecins ». Pour le corps médical, ces précisions sont d’autant plus importantes qu’après la Cour constitutionnelle, c’est le Bundestag (le Parlement), qui doit débattre prochainement d’une « libéralisation » du suicide assisté, soutenue par 67 % de la population.
Le poids de l'Histoire
Les médecins sont là aussi vent debout contre ce projet, rappelant la primauté de leur mission en tant que défenseurs de la vie, y compris de celles des personnes incapables d’exprimer un choix. Au-delà de l’influence de l’Église catholique encore forte dans de nombreuses régions, les médecins restent marqués par leur histoire. Le corps médical fut, avec les juristes, la profession qui adhéra le plus massivement au parti et aux thèses nazis. Il soutint notamment les programmes d’euthanasie d’adultes et d’enfants handicapés menés à partir de 1939, dont l’ombre plane toujours sur les débats contemporains.
Cette extrême prudence se retrouve dans d’autres domaines de la bioéthique, que ce soit en matière de génétique ou de médecine de la reproduction. En 2018 par exemple, le Congrès des médecins s’est clairement opposé à tout assouplissement des lois sur l’avortement, alors que les partis de gauche, ainsi que de nombreuses organisations féminines, estiment que les règles actuelles limitent de manière excessive l’information et l’accès des femmes aux IVG.
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