« Au fond, la pandémie est une crise de solidarité et de partage », résumait le directeur général de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, dans son discours d'ouverture de l'Assemblée mondiale de la santé, fin novembre. La crise liée à l’épidémie de Covid-19 a en effet mis en lumière les difficultés à mettre en œuvre une réponse commune.
En mai dernier, un Panel indépendant d’experts, mandaté par l’Assemblée mondiale de la santé, pointait ainsi la « myriade d’échecs » dans la gestion de crise. Inefficience du Règlement sanitaire international, faiblesses de l’OMS, manque de partage des vaccins, diagnostics et traitements, etc. : ces défaillances ont miné « l’engagement énorme » des soignants et des chercheurs partout dans le monde, estimait alors Ellen Johnson Sirleaf, ancienne présidente du Liberia, corécipiendaire du Nobel de la paix en 2011 et coprésidente du Panel.
Six mois plus tard, sa collègue à la présidence du Panel, Helen Clark, ancienne Première ministre de Nouvelle-Zélande, saluait tout de même les avancées réalisées. « Nous sommes encouragés par le fait qu’il y a un certain mouvement pour combler les lacunes majeures exposées dans la préparation et la réponse à une pandémie mondiale. Des conversations ont lieu dans de nombreux endroits appropriés », soulignait-elle, précisant que les efforts entrepris restent « inégaux et fragmentés ».
Des négociations sur les rails
L’Assemblée mondiale de la santé, qui a rassemblé ses 194 membres pendant trois jours, du 29 novembre au 1er décembre, est par exemple parvenue à s’entendre sur le lancement de négociations pour la création d'un instrument contraignant. Le Règlement sanitaire international, chargé de gérer les alertes et les communications entre les États et l’OMS dès lors qu’il y a une suspicion d’un foyer infectieux à potentiel pandémique, est en effet jugé nécessaire mais obsolète.
Le processus de transformation va débuter par la création d'un organe intergouvernemental ouvert à tous les États membres et aux membres associés en vue de débattre et de rédiger les bases de ce nouveau levier. Un rapport intermédiaire est attendu pour mai 2023, et le résultat final sera présenté lors de l'Assemblée mondiale de la santé de mai 2024.
Autre enjeu majeur de la gestion de crise : le partage équitable des vaccins, diagnostics et traitements contre le Covid-19. Dès octobre 2020, l’Organisation mondiale du commerce (OMC), l’Afrique du Sud et l’Inde, soutenues depuis par de nombreux pays, ont déposé un projet de dérogation temporaire aux droits de propriété intellectuelle, notamment sur les vaccins, afin de permettre leur production et distribution partout dans le monde. Mais, pour l’heure, « l'iniquité reste très préoccupante », déplore le récent rapport des coprésidentes du Panel, qui dénoncent une « prise d’otage » de la santé mondiale par l’industrie pharmaceutique « dans un souci de profit ».
Dans ce domaine, des progrès sont à relever. Des hubs de production de vaccins à ARNm vont être créés en Amérique latine et en Afrique du Sud. Des accords de licence pour un accès large aux antiviraux développés par Merck et Pfizer ont été signés via le « Medicines Patent Pool ». En parallèle, de nouveaux instituts de partage d’informations et de surveillance des agents pathogènes en Suisse et en Allemagne ont été constitués.
Donner du poids à l'OMS
La réforme de l’OMS en revanche semble patiner alors que son manque d’indépendance, d’autorité et de moyens a été mis en cause. Ainsi, si les discussions sur l’augmentation des contributions des États sont en cours, celles sur la réforme de l’institution sont renvoyées à mai prochain. La proposition de création d’un fonds de préparation aux crises, avec un mandat et une légitimité politiques, reste peu débattue, de même que l’évolution de l’actuel Accélérateur ACT (ACT-A), dont dépend Covax, en une véritable plateforme mondiale pour la production des vaccins, des diagnostics et des traitements.
« Nous exhortons les États membres à passer moins de temps à débattre des virgules en commission alors qu'une pandémie fait toujours rage, que des gens meurent et qu'une nouvelle menace de pandémie pourrait survenir à tout moment et n'importe où », s’agace ainsi Helen Clark, rappelant, à l’instar du patron de l’OMS dans ses nombreux discours, que « personne ne sera protégé tant que tout le monde n’est pas protégé ».
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