« AU MOMENT où l’infection VIH semble mieux contrôlée et à l’aube de l’utilisation de traitements prophylactiques antirétroviraux pré-exposition sexuelle, il importe de ne pas baisser la garde sur les MST/IST, l’éternel recommencement », conclut le Pr Michel Janier, président de la section MST de la Société française de dermatologie, dans son éditorial. Certes, écrit-il, « si l’on compare les chiffres actuels de syphilis et de gonococcie à ceux observés jusqu’en 1980, on est bien en deçà, et fort heureusement ». Entre-temps, le sida est arrivé et la fin des années 1990 a vu dans les pays développés une quasi-disparition de ces deux IST. Mais, en 2000, la syphilis fait sa réapparition parmi les homosexuels et en 2003, la lymphogranulomatose, qui avait disparu au milieu des années 1980, a resurgi.
° Syphilis
Entre 2000 et 2009, 4 022 cas de syphilis précoce ont été recensés dont plus de 500 cas par an au cours des trois dernières années. Le nombre de cas a augmenté en 2007 puis diminué les deux années suivantes. Le profil des personnes atteintes a peu évolué : une majorité d’hommes (95 %) avec une forte proportion d’homosexuels (73 %) et de bisexuels (10 %). L’utilisation du préservatif est loin d’être systématique (2 % pour la fellation, 10 % des femmes et 24 % des hommes pour les pénétrations vaginales, 48 % pour les pénétrations anales entre hommes). Si le nombre de syphilis déclarées au stade latent a augmenté récemment, les syphilis symptomatiques restent majoritaires (65 %). L’étude montre aussi une baisse de la prévalence du VIH chez les personnes ayant une syphilis, de 53 % à 41 % de 2000-2002 à 2007-2009. Les auteurs restent prudents quant à l’interprétation de la baisse récente, le système de surveillance n’étant pas exhaustif, même si la régionalisation de la surveillance a amélioré le recueil de données. Ils proposent la « sensibilisation des personnels de santé au dépistage, au diagnostic et aux risques associés à la syphilis, tels que le risque de transmission du VIH ou la syphilis congénitale », de même que des campagnes de prévention des IST auprès des homosexuels et des hétérosexuels.
° Gonococcies.
Les gonococcies sont considérées comme un marqueur du relâchement de la prévention. Les données des réseaux Rénago (laboratoires volontaires) et RésIST (cliniciens des centres d’information, de dépistage et de diagnostic des IST), confirment une nette progression dans les deux sexes quelle que soit l’orientation sexuelle. Entre 2004 et 2009, 1 297 cas ont été déclarés, dont 58 % en Ile-de-France et 91 % chez les hommes. Le nombre de souches isolées, 6 381 entre 2001 et 2009, a lui aussi progressé chaque année (de 322 en 2001 à 1 442 en 2009). Les auteurs, Émile Nguyen et col., soulignent la proportion importante des formes asymptomatiques chez la femme, « à l’origine d’une sous-estimation du diagnostic pour cette population » et sans doute aussi « de la persistance de la transmission et de la diffusion de ces infections ».
° Infections à Chlamydiae.
Le nombre de lymphogranulomatoses vénériennes était en diminution en 2009 après avoir augmenté en 2007 et en 2008 (170 cas et 191 cas contre 117 et 140 cas en 2005 et 2006). « Il faut rester prudent » sur l’interprétation de cette décroissance car « les données de 2010 ne montrent pas un recul de l’infection au sein de la communauté homosexuelle masculine », soulignent Maithé Clerc et col. De plus, l’épidémie, jusque-là restreinte aux homosexuels séropositifs pour le VIH, semble s’étendre aux homosexuels séronégatifs. Une LVG rectale chez la femme et quelques cas de LVG non rectales ont été recensés.
Les infections urogénitales à Chlamydia trachomatis, font partie des infections endémiques dans la population. Leur prévalence chez les jeunes femmes est de plus de 3 %. Le bilan du réseau de laboratoires Rénachla montre une progression annuelle du nombre des diagnostics, du nombre de personnes testées, du nombre de diagnostics positifs et du taux de positivité, plus marquée chez les femmes. Les dépistages réalisés chez des sujets asymptomatiques sont en forte progression (plus de deux tiers des dépistages en 2009). Le Pr Michel Janier juge « souhaitable d’inscrire ce dépistage dans les priorités de santé publique et de le rendre gratuit ».
° Hépatite B
L’incidence de l’infection par le VHB (formes asymptomatiques et symptomatiques) est estimée à 2 421 cas par an en moyenne, dont 184 cas passeraient à la chronicité. « Plus de la moitié des personnes porteuses de l’Ag HBS ignorent leur séropositivité et la transmission de l’hépatite B par voie sexuelle reste préoccupante », observent Denise Antona et col. L’amélioration de la vaccination et du dépistage semble impérative.
* N° 26-27-28, 5 juillet.
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