« CETTE ÉPIDÉMIE a été causée par la confluence de plusieurs circonstances et n’était pas la faute, ou n’était pas due à l’action délibérée d’un groupe ou d’un individu. » Telle est l’une des principales conclusions du rapport demandé par l’ONU à la suite des polémiques sur l’origine de l’épidémie de choléra qui a provoqué la mort de plus de 4 500 personnes et touché près de 300 000 Haïtiens. Selon le groupe d’experts*, présidé par le médecin mexicain Alejandro Craviolo, du Centre international de recherche pour la diarrhée (Bangladesh), les conditions sanitaires au camp de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) à Mirebalais n’étaient « pas suffisantes » pour éviter une contamination fécale de la rivière Meye, un affluent du fleuve Artibonite d’où est partie l’épidémie.
Épidémie explosive.
Toutefois, les experts ne mettent pas en cause les Casques bleus népalais alors en poste dans cette partie de l’île, mais évoque plutôt « une confluence de circonstances » entraînant une épidémie explosive qui s’est ensuite répandue à travers toute l’île. Les chercheurs confirment que les souches retrouvées « sont génétiquement identiques, indiquant une source unique pour l’épidémie en Haïti », que cette souche est extérieure à Haïti, « très similaire mais pas identique aux souches du choléra de l’Asie du Sud actuellement en circulation en Asie. »
Cependant, soulignent-ils, « l’introduction de cette souche du choléra en raison de la contamination environnementale avec les matières fécales n’aurait pas pu être la source d’une telle épidémie sans les déficiences simultanées du système d’adduction d’eau, d’assainissement et de soins de santé ». Ils excluent une « faute » ou une « action délibérée, d’un groupe ou d’un individu ».
Plusieurs facteurs expliquent, selon eux, la diffusion rapide du vibrio : l’usage répandu de l’eau de la rivière pour faire la lessive, se baigner, boire et s’amuser ; l’exposition régulière des travailleurs agricoles à l’eau d’irrigation du fleuve ; le degré de salinité du delta de l’Artibonite, qui a fourni des conditions optimales pour une prolifération rapide de vibrio cholerae ; l’absence d’immunité de la population haïtienne au choléra ; les mauvaises conditions en matière d’eau et d’assainissement ; la migration d’individus infectés vers des communautés résidentielles et des centres de traitement ; le fait que la souche de type sud-asiatique à l’origine de l’épidémie provoque une diarrhée plus sévère en raison de la production plus importante de toxine cholérique ; les conditions de prise en charge des malades au début de l’épidémie qui ont probablement favorisé la propagation de la maladie à d’autres patients ou au personnel soignant.
Recommandations.
S’ils ne mettent pas en cause l’ONU, les experts recommandent que « les secouristes et le personnel des Nations Unies venant de zones où le choléra est endémique reçoivent une dose prophylactique d’antibiotiques avant leur départ ou soient testés pour confirmer qu’ils ne portent pas le virus du choléra ». Ils préconisent aussi une vaccination contre le choléra et une antibiothérapie préalable pour tous les employés des Nations unies et les secouristes se rendant dans des zones d’urgence, afin qu’ils soient protégés et qu’ils protègent la santé des autres.
Pour prévenir l’introduction d’une contamination de l’environnement local, « les installations des Nations unies à travers le monde devraient traiter les matières fécales en utilisant des systèmes qui inactivent les bactéries pathogènes avant l’élimination de ces matières fécales », concluent-ils.
Un groupe de travail devrait être mis en place, au sein des Nations unies, « afin d’étudier les conclusions et les recommandations formulées par le Groupe d’experts indépendants et d’en assurer un suivi rapide et approprié », a déclaré un porte-parole.
* Outre le président,, le Dr Claudio Lanata (Institut d’enquête nutritionnelle du Pérou), le Dr Daniele Lantagne (université d’Harvard, États-Unis) et le Dr Balakrish Nair (Institut national du choléra et des maladies entériques, Inde).
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