S’IL FALLAIT démontrer que la société L’Oréal avait un poids et une influence considérables en France, Françoise Meyers y est parvenue. Le combat qu’elle a mené contre « l’abus de faiblesse » dont sa mère, selon elle, a été victime, a ridiculisé la justice française et a déclenché un séisme dans le système politique. De cette bataille violente, Liliane, Françoise et le reste de la famille sortent indemnes. Pas le système judiciaire qui a été déchiré, avec une plainte pour violation du secret judiciaire contre la juge Isabelle Prévost-Déprez et un dépaysement de l’affaire à Bordeaux ; pas Florence Woerth, qui a perdu son emploi ; pas Éric Woerth dont la prometteuse carrière a été brisée ; pas la majorité, accusée d’avoir pour les riches et l’argent les yeux de Chimène ; pas même Nicolas Sarkozy, que l’on soupçonne encore, sans doute à tort, d’avoir touché une enveloppe lors d’un dîner chez Liliane.
Une cupidité à la mesure d’une richesse inouïe.
La détermination farouche de Françoise est à l’origine de ces dégâts sérieux. Il est vrai qu’elle s’est dressée contre un homme, François-Marie Banier et, accessoirement un autre, Patrice de Maistre, dont la cupidité a augmenté au fur et à mesure qu’ils calculaient l’incroyable fortune amassée par la propriétaire de L’Oréal. Tant de milliards d’euros ainsi accumulés leur permettaient, pensaient-ils, d’envisager d’en prendre un ou deux pour le premier, quelques millions pour le second, au mépris du droit de propriété et du fait qu’ils n’avaient joué aucun rôle dans cette création de richesse. L’affaire Bettenncourt, c’est une sorte de vertige collectif qui a conduit ceux qui en souffraient à agir de façon irrationnelle et excessive. Françoise en est arrivée à demander à un maître d’hôtel d’enregistrer les conversations de sa mère et le même personnage, vacillant sous les milliards, a trouvé logique d’être rémunéré pour une telle trahison. Un avocat ou deux ont été saisis par le vertige. Une comptable, payée deux fois, par la mère et par la fille, est devenue la principale accusatrice du pouvoir politique alors que sa crédibilité, détruite par l’argent, est désormais nulle. Même Florence Woerth s’est jetée dans ce qu’il allait devenir un guêpier sous le prétexte qu’approcher Liliane était déjà une consécration. Sans compter le yacht de Patrice de Maistre et la Légion d’honneur dont Éric Woerth l’a imprudemment décoré. Sans compter, surtout, l’avidité insatiable, le culot, les folles exigences de François-Marie Banier qui, quoi qu’il arrive, aura vécu, grâce à son seul charme, l’aventure parisienne la plus extraordinaire du siècle, même si son immense enrichissement n’est que le produit de son immense immoralité.
LES BETTENCOURT S’EN SORTENT TRES BIEN, PAS LES AUTRES
Excusez du peu, il n’aura pas in fine les quelque cinq cent millions d’euros que Liliane lui avait promis sous la forme de deux assurances vie. Mais il garde tous les dons qu’elle lui a déjà faits. Avec un demi-milliard, il figure quand même au palmarès des Français les plus riches. On nous dit que le soulagement est grand, dans la famille Bettencourt, à L’Oréal, dont les très nombreux salariés craignaient le démantèlement, à l’Élysée, qui redoutait que la société devienne suisse (parce Nestlé détient un tiers de sa valeur). Nous nous permettrons néanmoins de croire que l’arrangement Liliane-Françoise épargne quelques malandrins et abandonne à leur sort des personnes, par exemple le couple Woerth qui, elles, n’ont tiré aucun profit personnel de l’affaire, alors que M. Woerth n’a pas fini de rendre des comptes à la justice. La leçon de l’histoire est qu’il y a plus puissant que le pouvoir politique, c’est celui de l’argent. Une famille de Neuilly peut ainsi, comme l’éléphant dans la magasin de porcelaine, s’agiter en tous sens et broyer au passage quelques âmes et quelques corps. Et puis se calmer, retrouver sa sérénité, son bonheur, son fric, pendant que ses victimes gémissent encore sous l’effet de la douleur.
› RICHARD LISCIA
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