Garantir un cadre de vie serein pour les enfants et valoriser l'exercice des professionnels : tels sont les grands objectifs du projet de loi relatif à la protection de l'enfance, présenté par le secrétaire d'État Adrien Taquet ce 16 juin en Conseil des ministres.
Complétant les lois sur la protection de l'enfance de 2007 et 2016, ce texte devrait être examiné en première lecture à l'Assemblée nationale dans la première quinzaine de juillet. L'on considère que 350 000 enfants relèvent de la protection de l'enfance, qu'ils soient à domicile, ou placés en foyer ou chez des assistants familiaux. Mais « l'action des professionnels engagés reste trop souvent entravée par des cadres inadaptés et des coordinations défaillantes. Premières victimes, des milliers de filles et de garçons sont encore privés de l’environnement sain, sécurisé et stable, dont ils ont besoin pour grandir », justifie dans le dossier de presse le secrétaire d'État. Ce dernier avait même reconnu des « dysfonctionnements majeurs » dans six départements à la suite d'un reportage de « Zone interdite » diffusé en janvier 2020.
Interdiction des placements à l'hôtel
Afin d'offrir un cadre de vie apaisé aux enfants confiés à l'Aide sociale à l'enfance (ASE), le projet de loi prévoit l'interdiction de l'accueil des mineurs dans les hôtels, à quelques exceptions près précisées par décret (urgence, mise à l’abri, avec une limite à deux mois au maximum et un accompagnement éducatif renforcé). Une situation dénoncée dans un récent rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et qui touche 7 500 à 10 500 mineurs, en grande majorité des mineurs non accompagnés (MNA). Mais le projet de loi ne prévoit ni financement supplémentaire pour créer des places décentes ni taux d'encadrement minimal dans les foyers (contrairement à une première mouture).
Avant un placement à l'ASE, la règle sera de rechercher un accueil dans l'environnement de l'enfant, pour assurer sa sécurité affective.
Pour lutter contre les maltraitances et violences, le projet prévoit que les adultes au contact des enfants, professionnels et bénévoles, feront l'objet d'un contrôle de leurs antécédents judiciaires lors de leur recrutement et pendant leurs fonctions. Les foyers devront formaliser une politique de lutte contre la maltraitance et désigner un référent externe que les enfants pourront saisir directement. Et tous les professionnels devraient être mieux formés au repérage et à la remontée des informations préoccupantes liées à des faits de violence, sur la base d’un référentiel national partagé (la Haute Autorité de santé propose d’ores et déjà des outils).
Modernisation de la profession d'assistant familial
La moitié des enfants protégés est confiée à des assistants familiaux. Pour reconnaître leur engagement, le projet prévoit la fixation d’une rémunération minimale de l’assistant familial pour l’accueil d’un seul enfant (alors qu'aujourd’hui, il perçoit moins que le Smic), et le maintien de leur rémunération en cas de suspension (à distinguer du retrait) de l'agrément. Il leur permet de poursuivre leur activité professionnelle au-delà de 67 ans afin de continuer à prendre en charge des enfants qui leur sont déjà confiés.
Une base nationale des agréments devrait être créée afin de protéger les enfants, en contrôlant mieux les professionnels qui exercent dans plusieurs départements ou qui seraient susceptibles de changer de département après un retrait d’agrément.
Pour les mineurs non accompagnés (en 2019, 31 000 d'entre eux ont été pris en charge par l'ASE), le texte prévoit de modifier la clé de répartition sur les territoires pour mieux prendre en considération les spécificités socio-économiques des départements et l'engagement de leurs politiques sur sujet. Le gouvernement veut aussi rendre obligatoire pour tous les départements le recours au fichier d’aide à l’évaluation de la minorité (AEM), pour « faciliter les démarches de détermination de la minorité et accélérer la protection des jeunes effectivement mineurs ». En 2018, 50 000 évaluations ont été réalisées par les départements, pour 17 000 reconnaissances de minorité (soit un tiers des demandes), lit-on.
Coup de pouce à la PMI
Le projet de loi inscrit dans la loi des objectifs de santé publique pour la Protection Maternelle et Infantile (PMI). Il amplifie le soutien financier des PMI par l’État (dans la lignée des 100 millions d’euros déjà mobilisés dans le cadre de la contractualisation prévue dans la stratégie de la protection de l'enfance) via la prise en charge par la sécurité sociale des actions réalisées hors les murs par les personnels de la PMI, par exemple dans les écoles. Enfin, le projet de loi prévoit une réforme de la gouvernance de l'ASE.
Les acteurs de la protection de l'enfance se félicitent des avancées ponctuelles du projet de loi, mais en déplorent le manque d'envergure. Les anciens enfants placés regroupés dans l'association Repairs ont vivement critiqué l'absence de toute mesure au-delà du 18e anniversaire pour éviter que les jeunes de l'ASE ne soient « jetés à la rue ». « Plus d'un jeune sans abri sur trois est un ancien enfant placé », selon Repairs.
De son côté, l'Unicef s'élève contre l'utilisation du fichier AEM à l'égard des mineurs isolés étrangers : « Sa généralisation va renforcer ses effets délétères : elle dissuadera encore davantage les jeunes de demander une protection, facilitera leur expulsion avant même qu’ils aient pu exercer un recours, et multipliera les risques d’erreur dans l’évaluation de leur minorité », s’inquiète Clarence Jaccard-Briat, directrice générale d’Unicef France. Et de demander que le juge des enfants soit l'acteur central de l'évaluation de leur situation.
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