POURQUOI la France, pays au monde qui compte le plus de femmes utilisant une contraception, enregistre-t-elle près de 200 000 interruptions volontaires de grossesse par an, autant qu’en 1975 ? Et comment expliquer que les deux tiers des femmes qui demandent une IVG ont pourtant un moyen de contraception ? Autant de questions qui, en l’absence de réponse unique, conduisent au constat que la contraception reste un domaine de la sexualité qui, sans être aussi tabou qu’il a pu l’être par le passé, véhicule encore bien des interrogations et des interprétations erronées.
Le désir de maîtriser la fertilité est une recherche constante depuis l’Antiquité. Depuis la fève de Misy dissoute dans l’eau préconisée par Hippocrate, les recommandations ésotériques d’Albert le Grand, qui conseillait aux femmes de cracher trois fois dans la bouche d’une grenouille, de manger des abeilles ou de boire de l’urine de mouton ou le traditionnel kabutogata japonais (condom solide en écailles de tortue), la contraception a bien évolué ! Aujourd’hui, la pilule est en France la première méthode contraceptive, utilisée par 45,8 % des femmes de 18 à 44 ans, devant les dispositifs intra-utérins (16,1 %), et loin devant le préservatif (7,5 %). Depuis sa première commercialisation en France en 1968, juste après la loi Neuwirth qui abrogeait l’interdiction de toute contraception, jusqu’à son remboursement et sa prescription possible aux mineures sans l’autorisation parentale le 4 décembre 1974, la pilule s’est donc progressivement positionnée comme le premier moyen contraceptif. Son efficacité associée à ses bénéfices non contraceptifs (traitement des dysménorrhées et des ménorragies, réduction du risque de kyste ovarien fonctionnel…) ainsi que la réduction constante de ses effets indésirables grâce à la recherche pharmaceutique sont les principales raisons de son succès. Pour autant, le travail d’information à l’intention des plus jeunes, et particulièrement des adolescentes, reste d’actualité.
Relation de confiance.
Pour le Dr Marie-Noëlle Laveissière, gynécologue à Paris, « la première consultation de contraception est un moment primordial pour la jeune fille. Si elle est réussie, cela lui permettra d’arriver mieux armée à l’âge adulte. L’important est de lui faire comprendre qu’elle est unique et de la rassurer en répondant à toutes ses interrogations. Il n’y a pas de méthode standard, hors la nécessité d’instaurer une relation de confiance avec la jeune patiente. » Même discours chez le Dr Marie-Laure Brival, chef de service de la Maternité des Lilas et présidente de l’Association nationale des centres d’interruption de grossesse (ANCIC) : « La mise en place d’une contraception nécessite du temps et du dialogue. Pour cela, les centres de planification et d’éducation familiale (CPEF) représentent un lieu intermédiaire entre l’hôpital et le cabinet privé qui est idéal pour les jeunes et les plus démunis. » Communiquer avec les jeunes sur la question, c’est également la mission que s’est assignée la section « junior » de l’Association française pour la contraception (AFC) qui va à la rencontre des adolescents dans différentes manifestations festives.
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