Lorsque les cellules sensorielles auditives situées à la base de la cochlée, dévolues à la détection des sons aigus, ne remplissent plus leur fonction, la gêne auditive peut être considérable dans un environnement bruyant, sans que l’audiogramme soit pour autant très affecté.
Ce phénomène vient d’être mis en évidence dans un article publié dans le journal « Proceedings of the National Academy of Sciences » (PNAS), écrit par le Dr Aziz El Amraoui et le Pr Christine Petit, directrice de l’unité de Génétique et Physiologie de l’Audition de l’Institut Pasteur (INSERM UMRS 1120), professeure au Collège de France et par le Pr Paul Avan de l’université d’Auvergne, directeur de l’équipe de biophysique neurosensorielle de la Faculté de médecine de Clermont-Ferrand (INSERM UMR 1107). Ces chercheurs ont étudié des souris porteuses d’une mutation affectant tout particulièrement le fonctionnement des cellules ciliées externes situées à la base de la cochlée, organe sensoriel de l’audition.
Réponse aux sons aigus
Ces souris ne présentent qu’une légère perte de l’audition affectant seulement la réponse aux sons aigus (sons de haute fréquence). Cependant en présence de sons graves (sons de basse fréquence), tels que des bruits, la réponse aux sons aigus est fortement perturbée.
La raison : la région apicale de la cochlée qui répond en temps normal aux sons graves répondrait chez ces souris mutantes aussi aux sons aigus prenant ainsi le relais des zones endommagées. « Dans une cochlée saine, les sons aigus sont traités dans la région basale de la cochlée ; ils ne peuvent pas se propager à sa région apicale qui répond aux sons graves », précise le Pr Christine Petit. « Les cellules sensorielles de l’apex qui, chez ces souris mutantes, sont épargnées par l’atteinte, peuvent détecter des sons aigus. Leur réponse n’a cependant pas les mêmes caractéristiques que lorsqu’elles sont stimulées par des sons graves, c’est-à-dire à leur fréquence caractéristique, leur fréquence de résonance. La sélectivité fréquentielle de leur réponse est bien moindre », explique le Pr Petit. « Nous avons observé une transposition fréquentielle qui peut atteindre plus de deux octaves, poursuit-elle. Mais cette transposition a pour conséquence d’exposer la détection des sons aigus à une très forte interférence avec celle des sons graves, auxquels répondent très efficacement les cellules de l’apex de la cochlée qui sont saines. En présence de sons graves, à des intensités bien moindres que celles des sons aigus, la réponse à ces derniers est masquée par les premiers. »
Et chez l’homme ?
Les chercheurs disposent d’arguments qui laissent penser que le mécanisme décrit chez la souris mutante est aussi présent chez l’homme, chez des individus atteints de certaines formes de surdité congénitale héréditaire ou de perte de l’audition survenant tardivement, comme la presbyacousie, ou encore, en cas de traumatisme acoustique par des sons de hautes fréquences. Pour le Pr Petit, « le message clinique de ces travaux de recherche fondamentale est le suivant : quand une personne se plaint de difficultés de perception des fréquences aiguës dans des environnements bruités mais que son seuil de réponse à ces fréquences sonores, apprécié par l’audiogramme, est peu touché, il y a là un signe d’appel qui doit conduire à une investigation clinique plus approfondie de son audition ». En complément d’une audiométrie standard, les auteurs de cet article préconisent l’exploration des produits de distorsions acoustiques portant sur une large gamme fréquentielle, ainsi qu’une analyse de la discrimination fréquentielle et des épreuves de masquage. Le réglage des appareils auditifs devrait être bien plus performant une fois identifiée par ces tests la nature de l’atteinte cellulaire sous-jacente et bien comprises ses conséquences fonctionnelles.
An unusually powerfull mode of low-frequency sound interference due to defective hair bundles of the auditory outer hair cells. PNAS 2014
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