Ce pourrait être le coup d’arrêt de la controverse sur l’intérêt des bisphosphonates en adjuvant dans le cancer du sein. Une métaanalyse de l’Early Breast Cancer Trialists’ Collaborative Group (EBCTCG), publiée dans le « Lancet », montre que ces traitements de l’ostéoporose diminuent le risque de récidive osseuse et améliorent la survie globale, mais à la condition qu’ils soient administrés après la ménopause.
« Ces résultats vont nous amener à revoir nos pratiques, explique le Pr Jean-Yves Pierga, oncologue à l’institut Curie (Paris). La question des bisphosphonates, qui a subi des rebondissements, n’était pas tranchée dans le cancer du sein : ces médicaments de l’ostéoporose diminuent-ils vraiment le risque de métastases osseuses et la mortalité par cancer du sein ? L’étude de l’EBCTCG, d’après les données de plus de 18 700 femmes, a établi leur intérêt et a clarifié les choses. Avant la ménopause, les bisphosphonates ne présentent pas de bénéfice dans le cancer du sein, mais il existe un réel gain sur la mortalité après. De plus, leur prescription présente peu d’inconvénients : ce sont des molécules économiques et aux effets secondaires limités. »
L’association pionnière aux inhibiteurs de l’aromatase
Les bisphosphonates sont souvent prescrits en association à l’hormonothérapie par inhibiteurs de l’aromatase, qui exposent au risque d’ostéoporose en effet secondaire. « Une autre étude intéressante dans le cancer du sein est publiée dans le même numéro du « Lancet », poursuit le Pr Pierga. Et ces deux études chez la femme ménopausée se font clairement écho. Celle sur l’intérêt des inhibiteurs de l’aromatase par rapport au tamoxifène conforte les recommandations existantes sur leur utilisation préférentielle en cas de récepteurs œstrogènes positifs à la ménopause. » Ces deux études indiquent ainsi un standard dans le cancer du sein de la femme ménopausée estrogène positif : une hormonothérapie par inhibiteurs de l’aromatase en association avec un bisphosphonate.
Malgré tout, les bénéfices des bisphosphonates ne se limitent pas aux inhibiteurs de l’aromatase et s’étendent bien au-delà, puisque leur utilisation était associée à une mortalité globale diminuée, quel que soit le traitement choisi pour le cancer du sein. « Alors que 30 % des femmes décrochent de l’hormonothérapie au bout de quelques années, la qualité de vie secondaire au traitement est importante pour l’observance, indique l’oncologue. Les effets secondaires des inhibiteurs de l’aromatase tels que les arthralgies, les bouffées de chaleur, la labilité de l’humeur sont parfois très difficiles à supporter. Certaines femmes supporteront mieux les inhibiteurs de l’aromatase, d’autres le tamoxifène. »
Autre constat intéressant, la prescription des bisphosphonates s’est révélée bénéfique, quelle que soit la molécule administrée au moins 2 ans. « Tous les schémas semblent possibles, notamment celui à une injection annuelle », poursuit-il. Une question reste cependant en suspens à propos de la nouvelle génération de médicaments de l’ostéoporose, les anticorps monoclonaux comme le dénosumab (Xgeva, Prolia). « Il n’y a encore aucune donnée d’efficacité pour ces médicaments très performants, mais aussi beaucoup plus chers », précise-t-il.
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