«C LASSIQUEMENT, on distingue deux grands types de cicatrices exubérantes. D'une part, les cicatrices hypertrophiques, qui ne débordent pas la zone agressée, et qui régressent spontanément en dix-huit à vingt-quatre mois, et, d'autre part, les cicatrices chéloïdes, qui débordent plus ou moins largement la zone agressée par l'intermédiaire de pseudopodes, qui ne régressent pas et tendent même à suivre une progression à long terme accompagnée des conséquences fonctionnelles », rappelle le Dr Olivier Dereure (CHRU Montpellier). Ce phénomène, mal connu, trouve une origine hétérogène impliquant des facteurs de risque clinique ainsi que des mécanismes biochimiques et cellulaires. Parmi les facteurs de risque clinique, on distingue des facteurs locaux - cicatrices perpendiculaires aux lignes de tension, corps étrangers intralésionnels - et des facteurs généraux : âge de 10 à 30 ans, ethnie (Noirs africains et Hispaniques ont un risque plus élevé que les Caucasiens), des facteurs héréditaires tels que le groupe sanguin A et certains HLA, dont l'importance n'a pas encore été clairement définie. Enfin, l'association à une hypertension artérielle a été évoquée en raison du rôle de l'angiotensine dans ces phénomènes.
Analyse histologique et biochimique
L'analyse histologique d'une cicatrice exubérante montre des différences notables avec des cicatrices considérées comme normales : hyperplasie de l'épiderme, épaississement du derme, présence de collagène anormal hyalinisé, absence de fibres élastiques accompagnée d'une hypertrophie des annexes, présence de mastocytes. Dans le cas des cicatrices hypertrophiques, il existe une richesse particulière en fibroblastes et vaisseaux, alors que, dans le cas des chéloïdes, les tissus sont infiltrés par des myofibroblastes et pauvres en vaisseaux.
L'analyse biochimique de ces cicatrices exubérantes retrouve des anomalies de la matrice extracellulaire avec une production excessive de fibronectine, de tenascine, de collagène, notamment de type I, et de glycosaminoglycanes, diminution de l'activité et de la production des collagénases et anomalies qualitatives des fibres de collagène. Des études des facteurs de croissance montrent une hyperexpression des TGF bêta 1 et 2, des récepteurs au PDGF, des récepteurs à l'IGF-1, du bFGF et du VEGF. Des études de gènes clés des cellules prouvent l'hyperexpression de bcl2, Cfos, l'absence d'expression de p53 - avec possiblement des mutations de p53 dans les chéloïdes et l'absence d'anomalies de c-myc.
Différentes théories physiopathologiques, non exclusives, ont été proposées dans l'apparition de ces cicatrices : ischémie chronique, anomalies de l'apoptose des myofibroblastes et dérèglement intrinsèque des facteurs de croissance (rôle central des TGF bêta 1 et 2, hyperexpression des facteurs transcriptionnels, c-fos, régulant leur expression).
Des pistes pour les brûlés
La compréhension de ces mécanismes a amené les spécialistes des services des brûlés à explorer des pistes thérapeutiques nouvelles : antagonistes des facteurs de croissance, agents inducteurs d'apoptose, agents de différenciation des myofibroblastes hyperactifs en fibroblastes peu actifs, enfin, contraintes physiques (actuellement développées à titre expérimental sur des fibroblastes).
« Parmi les techniques de prise en charge des cicatrices hypertrophiques et chéloïdes, les chirurgiens ont développé des techniques d'excision précoce (26e jour) du tissu de granulation et de pression mécanique. Ces dernières permettent une diminution du diamètre des fibrocollagènes, une régularisation vasculaire et une diminution des muco-polysaccharides », explique le Dr Jean-Pierre Gavroy (Lamalou-les-Bains). Des techniques combinant la pression mécanique et l'utilisation de feuilles de gel de silicone ont aussi été développées afin de lutter contre les cicatrisations hypertrophiques et congestives. Les feuilles de silicone contribuent, un mois après une utilisation progressive, à un amincissement de la peau, à une diminution de l'hypertrophie et à un doublement du temps de recoloration (mesure effectuée à l'aide d'un appareil spécifique comportant une fenêtre de pression transparente et un chronomètre et qui donne un reflet de l'état de vascularisation de la peau cicatricielle).
Un symposium satellite organisé par les Laboratoires Smith et Nephew à l'occasion de la 5e Conférence nationale des plaies et cicatrisations.
Le niveau de risque
- Zones à haut risque : sternum, partie supérieure du dos.
- Zone à risque intermédiaire : cou, lobule de l'oreille, deltoïde.
- Zone à faible risque : lombes, abdomen, médiofaciale, organes génitaux externes féminins.
Exceptionnel : paumes, plantes, paupières, pénis.
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