Recommandations européennes de prise en charge des péricardites aiguës

Des algorithmes pour aider les cliniciens

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Publié le 16/06/2016
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Les dernières recommandations européennes sur les syndromes péricardiques, notamment les péricardites aiguës, dataient de 2004. L'actualisation de 2015 (1) donne une définition précise de la péricardite aiguë, qui doit répondre à au moins deux critères sur les quatre suivants : douleur péricardique, frottement à l'auscultation, anomalies à l'ECG et épanchement péricardique à l'imagerie.

Parmi les innovations : des algorithmes pour aider les praticiens dans le triage des patients.

« Le premier objectif est d'identifier les patients qui requièrent une hospitalisation, soit parce qu'ils présentent des critères de gravité, soit parce qu'une étiologie particulière relevant d’une prise en charge spécifique est suspectée », précise le Pr Philippe Charron (voir figure). Trois groupes d’étiologies sont ainsi mises en avant : les causes bactériennes et tuberculeuses, les causes néoplasiques et les maladies auto-immunes.

Les recommandations proposent également un bilan étiologique précis en première et en deuxième intention. Elles insistent sur l'inutilité des sérologies virales, de faible valeur diagnostique, qui ne doivent donc plus être demandées, exception faite des sérologies VIH et VHC. En deuxième intention, elles soulignent l'apport de l'imagerie, le choix entre scanner et IRM se faisant en fonction des étiologies suspectées. En cas de suspicion de cause néoplasique, une analyse cytologique du liquide péricardique doit être réalisée, si besoin une biopsie péricardique.

La colchicine en première intention

Dans le domaine thérapeutique, l'une des grandes nouveautés est le recours en première intention à la colchicine, qui vient s'ajouter à l'acide acétylsalicylique (ASA) ou aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). « Il s'agit d'une recommandation de niveau Ia, qui se fonde sur des essais thérapeutiques ayant démontré les bénéfices de la colchicine sur la durée des symptômes, la durée de l'hospitalisation et le risque de récidive », souligne le Pr Charron.

Les recommandations précisent la durée de restriction de l'activité physique, de 3 mois pour les sportifs de haut niveau et jusqu'à résolution des symptômes et en fonction des examens paracliniques pour les patients tout-venant. En cas de suspicion de tuberculose, une preuve bactériologique est indispensable avant de mettre en route un traitement antituberculeux en France. Mais un traitement empirique est admis dans les zones de forte endémie.

Tout un chapitre est consacré aux procédures interventionnelles de drainage péricardique. Les recommandations soulignent les indications privilégiées : tamponnade, suspicion de cause bactérienne ou néoplasique, épanchement symptomatique qui ne répond pas au traitement médicamenteux.

Enfin, un algorithme de prise en charge de la péricardite aiguë récidivante est proposé :

- en première intention : ASA ou AINS et colchicine, restriction de l'activité sportive ;

- en deuxième intention : discuter les corticoïdes à faible dose ;

- en troisième intention : discuter les immunosuppresseurs ou immunomodulateurs ;

- enfin, en cas d'échec de toutes ces stratégies, un traitement chirurgical de péricardiectomie est discuté.

D'après un entretien avec le Pr Philippe Charron, groupe hospitalier Ambroise Paré, Boulogne-Billancourt.

(1) Adler Y et al. 2015 ESC Guidelines for the diagnosis and management of pericardial diseases.DOI : http://dx.doi.org/10.1093/eurheartj/ehv318

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Bilan Spécialiste