D OUZE personnes, originaires du centre de la Chine, ont comparu devant le tribunal correctionnel de Paris pour pratique illégale de la médecine et pour avoir usurpé le titre de docteur.
Des peines de prison avec sursis allant de 4 à 10 mois ont été requises contre quatre d'entre eux, dont trois avorteuses. Les amendes requises s'étalent entre 10 000 et 30 000 F. Le jugement est mis en délibéré.
Les accusés, mis en examen en 1997 pour exercice illégal de la médecine (« le Quotidien » du 24 novembre 1997) et usage sans droit du titre de docteur en médecine, ont notamment pratiqué des avortements, arraché des dents et prescrit des médicaments. L'Ordre des médecins et l'Assistance publique de Paris se sont constitués partie civile.
Originaires de la ville de Wenzhou dans la province du Zhejiang, au sud-est de la Chine, la plupart des prévenus, sept hommes et cinq femmes, y avaient exercé la médecine, à l'hôpital en tant que médecins ou infirmières.
Deux « dentistes » y avaient appris cet art de leurs pères. Le siège de l'un d'eux était une chaise longue de type transat. L'instruction n'a pas réussi à déterminer si la roulette utilisée était mécanique ou électrique. L'audience n'a pas davantage permis de préciser le type de calmant administré aux patients.
Interrogés, avec l'aide d'une traductrice, par le président de la 16e chambre, Hervé Stephan, ces « praticiens », entrés clandestinement et qui ont régularisé pour la plupart leur situation, ont généralement reconnu les faits mais ont plaidé l'ignorance, « rendant service » dans une communauté fermée ou les francophones sont rares.
Consultations dans des hôpitaux parisiens
Seul l'un d'eux, Jean Char, naturalisé français, appelé aussi « Docteur Zhang » dans le milieu chinois, est un « vrai » praticien au sens français du terme. Acupuncteur et ophtalmologiste en Chine, il a été accueilli en France pour se former, a expliqué à la cour le Pr Laurent Laroche, chef du service d'ophtalmologie à l'hôpital des Quinze-Vingt, à Paris.
Ne pouvant exercer que comme « attaché associé » bien qu'il ait repris ses études à son arrivée à Paris en 1983, il a donné des consultations pendant six ans dans plusieurs hôpitaux parisiens. Une écoute téléphonique a permis d'établir qu'il vendait des certificats médicaux 150 F, ce qu'il nie, contestant la traduction.
Bien mis, impeccablement coiffé, très respectueux, il a tenté d'expliquer qu'il était « normal dans ce cadre-là que les gens viennent me demander des conseils ». Deux associations de Chinois de Paris lui ont d'ailleurs demandé d'assurer des conseils à leurs membres.
Un Français de ses amis est venu expliquer comment tous les salons chinois, avec leurs meubles alignés le long des murs, pouvaient ressembler à des salles d'attente comme l'ont écrit les policiers qui pensaient avoir démantelé un « réseau ». Ils n'ont établi aucun lien entre les douze prévenus, si ce n'est des cartes de visite où figuraient, en caractères chinois, le titre, usurpé, de « docteur ».
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