Échanges dynamiques

Pr Jean Daléry (1)

C’EST AU mois d’avril 1981 à Toulouse qu’est née l’Association Franco-Maghrébine de Psychiatrie. Des psychiatres universitaires maghrébins et français qui se connaissaient bien se retrouvaient lors d’un colloque intitulé « La psychiatrie au Maghreb » et échangeaient leurs différents points de vue, leur conception de la maladie mentale et ses traitements. L’ensemble des exposés de cette rencontre ont par la suite été publiés dans le premier numéro de Psychiatrie Francophone.

Il apparaissait alors évident que psychiatres français et maghrébins avaient un langage commun, dans la mesure où ils avaient été formés à la psychiatrie à partir des mêmes textes de référence de la psychiatrie française et partageaient le même souci de mieux comprendre et mieux traiter la maladie mentale et la souffrance psychique. À la fin du colloque, six d’entre eux se retrouvaient pour une rencontre amicale organisée par P. Moron. Il s’agissait de S. Ammar (Tunisie), F. Chkili (Maroc), M. Boucebci (Algérie), G. Darcourt, M. Laxenaire et Pierre Moron. Ce dernier évoqua alors l’idée de renforcer les liens entre psychiatres de part et d’autre de la Méditerranée. Ainsi est née l’Association Rencontres Franco-Maghrébines de Psychiatrie, qui deviendra plus tard l’Association Franco-Maghrébine de Psychiatrie.

Congrès annuel.

L’objectif de cette association était de favoriser les rencontres entre psychiatres français et maghrébins et de les formaliser sous la forme d’un congrès annuel qui devrait se tenir une année en France et une année dans un pays du Maghreb. Ce congrès serait un lieu d’échanges, de discussions, de confrontations des conceptions et des pratiques de notre discipline. Cet objectif a été tenu, puisque l’Association a organisé un congrès chaque année depuis 1981 (lire encadré) et, en octobre 2013, le 32^e congrès, présidé par Jean-Michel Azorin, s’est tenu à Marseille sur le thème « Psychiatrie, Cultures et Religions ». Il a obtenu un vif succès.

Pierre Moron, qui a été à l’origine de cette association, en a été le secrétaire général jusqu’en 1999. Il est aujourd’hui décédé, mais sa présence chaleureuse lors de chaque congrès était appréciée par tous les participants.

Le succès de ces rencontres tient autant à l’amitié qui relie nos collègues français et maghrébins de toute génération, qu’à la richesse des échanges et des discussions qui animent chaque congrès.

Les psychiatres maghrébins connaissent très bien la psychiatrie française – la plupart étant d’ailleurs venus en France pour compléter leur formation psychiatrique auprès des grands psychiatres français – et leur attachement à la culture française est majeur. Certains sont restés travailler en France. Les psychiatres français sont très désireux d’apprendre de leurs collègues maghrébins des aspects sémiologiques spécifiques de leur discipline qu’ils connaissent mal. Les échanges sont donc passionnants et instructifs pour tous. Les liens d’amitié qui ont permis la création de l’association par nos aînés se retrouvent dans les jeunes générations.

Changement de statuts.

De nouveaux statuts ont été établis en avril 1999, date à partir de laquelle, à la demande de Pierre Moron, j’ai assuré le secrétariat général. Nous avons pris la forme d’une association loi 1901, mais nous avons toujours maintenu la règle de l’alternance. Le bureau est constitué de membres français et maghrébins. Le président de l’association est le président du congrès. Le siège social est au CH le Vinatier. En 2004, nous avons décidé d’ouvrir l’association à nos collègues mauritaniens et nous espérons, quand la situation dans ce pays sera plus stable, organiser un congrès dans ce pays.

Le développement important de la psychiatrie maghrébine, et la création de nouveaux centres universitaires dans de nombreuses villes dans les pays du Maghreb, nous ferons prochainement modifier la règle pour donner plus de place à la psychiatrie maghrébine.

Bien sûr, le congrès annuel reste le point fort de la vie de notre association qui réunit alors son bureau et une assemblée générale. Mais ceci n’empêche pas des rencontres spécifiques et amicales plus informelles. Les opportunités de rencontres entre collègues psychiatres français et maghrébins ne manquent pas, soit en France soit dans les pays du Maghreb, qui organisent de plus en plus des congrès d’excellent niveau scientifique. Des jumelages existent entre les pays du Maghreb et des hôpitaux français, ce qui renforce les échanges.

Le climat d’amitié et d’échanges a toujours été très présent dans notre association. Nous avons tous du plaisir à nous retrouver et à échanger autour de notre conception et de notre pratique de notre discipline.

Un site a été créé et est régulièrement mis à jour par notre collègue Lotfi Gaha de Monastir : afmp-psy.org.

(1) Secrétaire Général de l’Association Franco-Maghrébine de Psychiatrie. Université Claude Bernard, Lyon. CH le Vinatier, Lyon. jean.dalery@ch-le-vinatier.fr