L'urologie en médecine générale

 En complément de la clinique : les indications du bilan urodynamique

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Publié le 23/06/2016
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Crédit photo : PHANIE

La réalisation d’un bilan urodynamique doit toujours s’inscrire dans une démarche diagnostique. Il s’agit en effet d’une exploration fonctionnelle qui vient compléter un interrogatoire minutieux et un examen clinique complet, qui ont déjà permis de recueillir des éléments d’orientation importants, comme une fuite urinaire à la toux. Il doit être effectué dans un but précis, pour apporter des informations fines.

Il comprend plusieurs explorations, qui peuvent être réalisées séparément : débitmétrie, cystomanométrie et évaluation de la compétence du sphincter urétral.

La débitmétrie étudie spécifiquement le débit urinaire en mesurant différents paramètres tels que le volume uriné, le débit urinaire maximal et moyen et en analysant les différents temps de la miction. Elle peut être complétée par la mesure du résidu postmictionnel par échographie ou sondage.

« La débitmétrie, riche d’enseignements, peut être faite de façon isolée lors d’une consultation, indique le Pr Christian Saussine. Elle peut être réalisée en début d’examen, avec une vessie naturellement remplie, comme à la fin d’un bilan urodynamique complet ».

La cystomanométrie consiste en l’évaluation du fonctionnement de la vessie par l’étude des pressions. La vessie est remplie selon des normes précises après introduction d’une sonde fine qui permet à la fois le remplissage de la vessie et la mesure des pressions grâce à des capteurs. « La vessie est un organe réservoir, dont le volume peut normalement s’accroître sans élévation marquée des pressions grâce à ses propriétés visco-élastiques », explique le Pr Saussine. Chez un sujet sain, les variations de pression sont faibles alors qu’en cas d’altération vésicale, les pressions augmentent fortement ce qui crée des besoins ou des fuites. La cystomanométrie s’intéresse également à ce que ressent le patient et à la séquence des besoins. À la fin du remplissage, il est demandé au patient de déclencher une miction et les débits sont à nouveaux mesurés. L’analyse de la corrélation entre les pressions intravésicales et les débits qui en résultent permet de préciser s’il y a ou non un obstacle.

« Dans un 3e temps, le bilan urodynamique évalue la compétence du sphincter urétral. La vessie est remplie de 200 cc de liquide et on fait circuler de la vessie vers l’urètre un capteur de pression. Le profil de pression mesuré a une allure en cloche, précise le Pr Saussine. Cette mesure peut confirmer les raisons d’une incontinence, mais ne modifie pas fondamentalement la prise en charge ».

Des indications formelles…

Un bilan urodynamique est indiqué dans toutes les pathologies neurologiques qui perturbent le fonctionnement de la vessie et des sphincters, telles que paraplégie, sclérose en plaques ou maladie de Parkinson. Il est en effet important de connaître le régime de pressions, qui varie en fonction du niveau d’atteinte de la moelle et de la durée d’évolution du trouble, en raison du risque de détérioration du haut appareil urinaire et in fine d’une insuffisance rénale. Il doit en général être répété tous les 2 à 3 ans.

…Et des indications à la carte

Dans les dysfonctions comme les besoins trop fréquents ou trop urgents, ou les fuites, un bilan urodynamique peut être demandé au cas par cas. L’AFU le recommande chez les femmes présentant une incontinence urinaire d’effort avant tout geste chirurgical, car il permet de guider au mieux le choix du geste.

Dans les urgenturies, il peut mettre en évidence des contractions involontaires de la vessie ou objectiver une hypersensibilité vésicale.

Chez les hommes ayant une incontinence à l’effort après une intervention chirurgicale, surtout après prostatectomie pour cancer, les urologues recommandent un bilan urodynamique qui permet de mieux en expliquer les causes.

L’examen est peu invasif, même s’il peut être un peu douloureux chez les patients ayant un trouble de la sensibilité vésicale. Il n’a pas d’effets indésirables, si ce n’est un risque d’infection urinaire (IU) essentiellement chez le patient neurologique. La recherche d’une IU, par ECBU idéalement ou à défaut par bandelette est systématique avant le bilan.

La débitmétrie est accessible facilement en consultation chez les urologues. Le bilan urodynamique complet nécessite un équipement particulier et l’offre est de répartition hétérogène sur le territoire.

D’après un entretien avec le Pr Christian Saussine

CHU Strasbourg

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin: 9507