« L’idée reçue, c’est une idée simple pour répondre à une question difficile. Or, en médecine, les questions sont souvent difficiles et pas toujours résolues. Il faut parfois savoir dire qu’on ne sait pas. C’est une chose très compliquée qui n’est pas souvent comprise », évoque le Dr Sylvia Giard, chirurgien et coordinatrice des 39e journées de la Société française de sénologie et de pathologie mammaire (SFSPM) qui se tiennent du 8 au 10 novembre à Lille. Une édition qui entend explorer les mythes et réalités inhérentes aux idées reçues sur le cancer du sein.
Parmi les thèmes aux programmes du congrès : les séquences thérapeutiques néo-adjuvantes, le carcinome canalaire in situ, les traitements systémiques adjuvants, la prise en charge du cancer du sein non métastatique, la prévention et bien sûr le dépistage organisé qui cristallise les polémiques et controverses. « Entre 10 et 20 % de cancers sont probablement surdiagnostiqués et l’on a conscience qu’il y a des surtraitements de femmes qui n’en ont pas besoin », reconnait le Dr Luc Ceugnart, radiologue et vice-président de la SFSPM. Mais « devant une question simple sur le caractère délétère du dépistage, la réponse n’est ni oui, ni non mais en termes de bénéfices-risques. La réponse est d’abord une donnée statistique qui ne s’adresse pas à une personne individuelle », souligne le Dr Giard.
Désescalade thérapeutique
« Face à la patiente, le risque c’est zéro ou 100 % », ajoute le Dr Ceugnart. « Faire croire aux femmes qu’on peut mieux cibler les risques, c’est tout ce que l’on demande mais c’est aujourd’hui illusoire de penser qu’on a les outils fiables pour conseiller à une femme de réaliser ou non une mammographie », poursuit-il.
« On sait faire des sous catégories de cancer du sein avec des pronostics d’agressivité mais cela reste des chiffres. Avant de pouvoir proposer une désescalade thérapeutique sans être délétère chez des patientes à faible risque évolutif, on a besoin de nouvelles études qui viennent tout juste de commencer et qui vont prendre des années », note le Dr Giard. « Attention à ne pas vouloir trop sous-traiter et entrer dans l’excès inverse. Il faut trouver un juste équilibre », insiste le Dr Bruno Cutuli, président de la Société française de sénologie et de pathologie mammaire (SFSPM).
Dégâts des antidépistages
« On voit encore des formes très évoluées de cancers complètement négligées chez des femmes de tous âges et de toutes catégories socioprofessionnelles chez qui il y a un refus du dépistage », fait-il remarquer. Aujourd’hui, « contrairement à ce qui est dit par certains antidépistages, les stades de cancer avancés diminuent », note le Dr Ceugnart. « Globalement avec un cancer dépisté par mammographie, les traitements sont moins lourds, il y a moins de chirurgie radicale, moins de chimiothérapie et moins de risque de mastectomie totale », rappelle-t-il. « Toutes les études montrent qu’un traitement sur une tumeur de taille 1 permet 90 % de guérison à 10 ans. Si on loupe la fenêtre de traitement optimale, c’est fini », résume le Dr Cutuli.
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