Jeux du cirque

Arthur Miller reconnaîtrait-il sa pièce ? D’un drame social, Ivo van Hove en a tiré une pièce qui certes est située à New York (Etats-Unis) mais dont le propos désormais est universel. Un oncle a élevé sa nièce. Il ne peut accepter qu’elle mène sa vie à 17 ans, tourne la tête des hommes et lui échappe. Le drame est alors inévitable lorsqu’il accepte d’héberger pour un temps deux frères, émigrés clandestins originaires d’Italie. Un moment, le spectateur peut se croire dans une tragédie grecque. La pièce est racontée par un avocat omniscient, nouvelle incarnation du chœur antique. En fait, nous sommes plutôt invités à Rome dans le Colisée où se déroule un nouvel avatar des jeux du cirque. Le dispositif scénique trifrontal transforme les acteurs, tous admirables en bêtes de scène. Le spectateur assiste ainsi à une mise à mort, à la manière d’une expérience de laboratoire. Ivo van Hove retire tout le gras de la pièce. Le décor de cette maison est stylisé, réduit à sa plus simple expression. Le mouvement d’un geste est parfois ralenti pour en mieux souligner l’importance comme dans une séance pédagogique de travaux pratiques. Résultat, le regard ne peut se détacher de ce qu’il voit. Mais il n’est pas emporté. Le final est prodigieux. Mais il relève davantage du morceau de bravoure, de l’effet que de l’éclairage de sens, du partage. Plutôt qu’ouvrir des abîmes sur la condition humaine, la mise en scène privilégie des images. Avec un triomphe garanti chaque soir. Est-ce cela le théâtre moderne ?