Le Généraliste. 40 ans après la loi Veil, le droit à l’IVG est-il menacé ?
Gilles Lazimi. Le droit à l’IVG ne me semble pas menacé aujourd’hui en France tel qu’il est inscrit dans la loi. En revanche, on continue de culpabiliser les femmes alors qu’une femme sur trois aura une IVG dans sa vie. La réalité montre également que certaines femmes retardent leur choix pour diverses raisons ce qui réduit leur possibilité d’intervention et précisément de choisir l’IVG médicamenteuse. Persiste aussi un discours des professionnels de santé sur les conséquences psychiques catastrophiques auxquelles elles devront faire face. Enfin, la fermeture de 130 centres d’IVG publiques et privées au cours des dix dernières années a contribué à restreindre l’accès des femmes à l’IVG.
Y a-t-il, selon vous, des mesures politiques et économiques à envisager pour améliorer l’accès à l’IVG ?
G.L. De nombreux progrès restent à faire. Il faut par exemple commencer à mieux former les médecins et les internes en médecine générale. Cela passe notamment par le fait de mieux accueillir ces femmes et de les déculpabiliser sans leur dire que ce sera un événement traumatique. Si on veut faciliter la prise en charge des IVG, on pourrait par exemple penser à prendre en charge les examens qui précèdent l’IVG comme les prises de sang, l’échographie… Pour les patientes qui n’ont pas de mutuelles ou qui sont sur la mutuelle de leurs parents cela peut leur poser problème. On pourrait aussi modifier l’obligation légale des sept jours de délai de réflexion. Car c’est en effet la seule pathologie pour laquelle cette mention existe. Enfin revaloriser cet acte et alléger la paperasserie administrative – le médecin doit par exemple se rendre lui-même à la pharmacie pour aller chercher les médicaments – sont autant de possibilités d’aménagements visant à améliorer l’accès à l’IVG.
Le Généraliste. Quelle est la place aujourd’hui du médecin généraliste face à l’IVG ? Et dans le futur ?
G.L. On constate depuis plusieurs années une progression des IVG médicamenteuse. Elles représentent aujourd’hui dans l’Hexagone la moitié des IVG. Et parmi ces 50%, un quart sont réalisées en ville. Je pense que même si l’allongement des délais d’attente dans les services d’orthogénie a joué sur le report des IVG médicamenteuses en ville, la place du généraliste est de toute évidence primordiale. Le cabinet du généraliste est le premier lieu où la femme va pouvoir demander des informations sur l’IVG. Il est pour cela essentiel que le médecin soit bien formé et qu’il soit en contact avec un réseau. Il existe par exemple REVHO qui est un réseau de santé ville-hôpital créé en 2004 qui permet aux femmes d’avoir recours à une IVG médicamenteuse avec leur médecin de ville. Citons aussi jaidesadresses.org, qui est une mine d’informations sur les professionnels de santé et les lieux où l’on peut pratiquer une IVG médicamenteuse.
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