Après des années d’angoisse face à la crise démographique qui la frappe de plein fouet, l’ophtalmologie voit son pouls s’apaiser. Certes, les délais d’attente pour une visite de contrôle restent trop longs : 108 jours en moyenne*.
Mais le Dr Jean-Bernard Rottier, président du SNOF, nuance : « le délai médian est de 74 jours. Et en urgence, le temps d’attente est satisfaisant : 2,5 jours en cas d’une première DMLA, 10 jours pour le deuxième œil, voire 7 en cabinet NOSO [nouvelle organisation des soins ophtalmologiques] ».
Derrière cet acronyme se joue l’avenir de la filière de soins oculaires. Entre 2008 et 2012, l’activité des ophtalmos a augmenté de 20 %. Deux tiers d’entre eux ont plus de 50 ans, et les plus de 65 ans sont désormais 550 (contre 122 en 2002). « Nous serons 10 à 15 % de moins dans 10 ans », précise le Dr Thierry Bour, secrétaire adjoint du SNOF. Le seul assouplissement du numerus clausus ne suffit pas à empêcher la pénurie médicale annoncée, pas plus que l’arrivée chaque année d’une trentaine de professionnels étrangers.
Protocoles prometteurs
Aujourd’hui, seuls 250 ophtalmologues travaillent en cabinet NOSO avec un orthoptiste.
L’agence régionale de santé (ARS) des Pays de la Loire a autorisé deux protocoles pour le renouvellement de lunettes : l’un pour les 6-15 ans qui, sans pathologie, ont déjà un dossier dans le cabinet et 10/10e aux deux yeux ; l’autre pour les 16-50 ans dont la dernière consultation remonte à moins de 5 ans. Afin de réduire les délais de prise en charge de 12 mois à 15 jours, ces patients, qui pourrait représenter à terme 20 à 25 % de la clientèle, sont vus par l’orthoptiste. L’ophtalmologiste contrôle le dossier et adresse une ordonnance dans un délai de 8 jours. Quelque 800 patients se sont pliés à l’expérimentation, depuis octobre.Le protocole est parfaitement accepté par les patients. « 2 à 3 % d’entre eux ont été reconvoqués immédiatement, mais ils l’ont bien vécu », explique le Dr Rottier.
L’expérience pourrait faire des petits. Dans la Sarthe, un protocole de télémédecine, en cours de validation, vise à mettre en place la consultation d’un orthoptiste à Neufchâtel (zone de pénurie), sous le contrôle du CHU de Rouen. Un autre protocole - suspendu à un décret en Conseil d’État - permettrait à l’orthoptiste, dans le cadre du dépistage de la rétinopathie diabétique, de prendre la photo du fond d’œil du patient.
À terme, une file active gérée par l’orthoptiste
Fort de ces résultats, le SNOF envisage de nouvelles étapes, permettant d’intégrer complètement la délégation de tâches. En clair, il espère aller au-delà du schéma intermédiaire avec travail aidé, qui permet déjà d’assurer 220 actes par semaine (contre 127 dans le modèle traditionnel de l’ophtalmo seul multitâches). Car dans ce schéma avec travail aidé, l’ophtalmologiste prend encore en charge la dernière partie de la consultation, ce qui limite le gain de temps médical.
La création d’une véritable file active (flux de patients) vue par l’orthoptiste (les dossiers étant supervisés par l’ophtalmologiste) permettrait d’effectuer 250 actes par semaines. « L’idéal serait que l’orthoptiste, d’ici à 15 ans, prescrive lui-même des ordonnances de lunettes et ne fasse suivre au médecin que les dossiers les plus complexes » avance le Dr Rottier. Une transition, prévient-il, qui ne pourra se faire sans un investissement financier des autorités sanitaires.
*Enquête réalisée par téléphone du 12 au 20 décembre 2013 par Kantar Health pour Novartis, auprès de 140 cabinets d’ophtalmologie interrogés (88 % en ville, 12 % à l’hôpital).
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