Un cœur virtuel personnalisé pour prévenir la mort subite

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Publié le 11/05/2016
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Crédit photo : PHANIE

L'implantation d'un défibrillateur peut sans aucun doute sauver la vie d'un patient souffrant d'arythmie cardiaque, mais la méthode reste invasive, coûteuse et relativement contraignante (contrôles fréquents, changement de batterie, risques d'infection…).

La difficulté tient aussi pour les médecins à déterminer quels sont les patients à haut risque d'arrêt cardiaque pour qui la prescription d'un défibrillateur est vitale. L'idée est ainsi née au sein du département de bio-ingénierie médicale de l'université Johns Hopkins de mettre au point un prototype de cœur virtuel personnalisé, intégrant toutes les données cliniques relatives à un patient afin de pouvoir simuler et prédire des incidents cardiaques potentiels. La preuve de concept vient d'en être publiée dans la revue « Nature Communications » avec les résultats concluants d'une première phase d'essai. Le VARP (pour Virtual-heart arrythmia risk predictor) a été testé sur 41 patients qui avaient précédemment fait un infarctus et dont la fraction d'éjection du ventricule gauche (FEVG) était inférieure à 35 %. Cette dernière étant l'un des déterminants majeurs de la décision d'implanter un défibrillateur automatique implantable à titre prophylactique chez un patient quand elle est inférieure à ce score.

Un indicateur plus fiable que la fraction d'éjection

« Notre prototype de cœur virtuel se révèle dans de nombreuses situations plus performant qu'une évaluation clinique en termes de prédiction des épisodes d'arythmie », souligne le Pr Natalia Trayanova, l'une des pionnières du développement de modèles numériques cardiaques, qui a dirigé ces travaux. Pour élaborer un modèle prédictif personnalisé, elle a travaillé en collaboration avec le Pr Katherine Wu, cardiologue spécialisée dans l'évaluation du risque cardiovasculaire par IRM. Les images recueillies pour chaque patient ont ainsi servi de base pour reconstituer une réplique de son cœur en 3D ainsi que de l'état de ses tissus cardiaques. Les chercheuses y ont fait circuler un courant électrique simulant l'activité des cellules cardiaques et ont observé dans quels cas ce cœur virtuel développait une arythmie. Comparaison a été faite ensuite des résultats avec les incidents enregistrés par les défibrillateurs des patients. Conclusion : les prédictions du VARP se sont révélées 4 à 5 fois plus fiables que celles suggérées par la fraction d'éjection ou autre indicateur clinique de risque.

Une approche complète et personnalisée du risque de mort subite

« Nous avons démontré que le VARP était plus fiable que toute autre méthode actuelle de prédiction de mort subite cardiaque », se réjouit le Pr Trayanova. Le Pr Wu trouve encourageant, quant à elle, que ce dispositif offre une alternative à l'évaluation du risque de mort subite par le score de fraction éjection car celui-ci n'est pas toujours fiable. En plus de pouvoir affiner les recommandations d'implantation de défibrillateurs, ce dispositif devrait également permettre d'optimiser l'évaluation des risques chez des patients ayant subi un infarctus mais que leur score de fraction d'éjection ne désignait pas a priori pour cette indication. « Avec cette technique, nous sommes capables de reproduire précisément et dans les moindres détails l'anatomie du cœur d'un patient et de le tester dans toutes les situations sans procédure invasive. C'est une approche complète, sans danger et individualisée de l'évaluation du risque de mort subite. »

Betty Mamane

Source : lequotidiendumedecin.fr