Le coût élevé du retard de croissance intra-utérin

Un pourvoyeur d’accouchements prématurés provoqués

Publié le 26/05/2014
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L’estimation de l’impact financier du retard de croissance extra-utérin (RCIU) est un long périple, dont l’équipe rassemblée par la fondation de coopération scientifique PremUP vient seulement de franchir la première étape.

Dans les premiers résultats qu’ils viennent de présenter, les chercheurs menés par Isabelle Durand Zaleski de l’unité de recherche clinique en économie de la santé d’Ile-de-France à l’Hôtel-dieu (AP-HP) se sont concentrés sur les coûts hospitaliers directs pendant la grossesse et la première année de vie. Leur étude a porté sur 68 000 enfants présentant un RCIU défini par un poids de naissance inférieur ou égal au 10e percentile pour chaque semaine d’âge gestationnel, qu’ils ont comparé à 347 000 contrôles non RCIU. L’ensemble des données médicales provenaient du programme de médicalisation des systèmes d’information en médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie (PMSI MCO).

Augmente quand l’âge gestationnel diminue

Pendant la grossesse et la première année de vie, un enfant touché par un RCIU coûte en moyenne 1 000 euros de plus qu’un enfant en bonne santé qui, lui, coûte 4 500 euros. Le surcoût augmente de façon exponentielle avec la diminution de l’âge gestationnel. Ainsi, un enfant RCIU né prématuré à 31 semaines coûte 7 000 euros de plus que son homologue non RCIU. Pour un âge gestationnel de 28 semaines, le surcoût explose littéralement pour atteindre 19 000 euros. Au total, ce sont 87 millions supplémentaires qui sont dépensés chaque année en France, en frais hospitalier entre la conception et la fin de la première année de vie.

« Ce n’est que la partie émergée de l’iceberg », a réagi Olivier Baud, chef du service de réanimation et de pédiatrie néonatales à l’Hôpital Robert Debré, « les RCIU sont des grands consommateurs de soins qui souffrent souvent d’anoxie chronique ou d’un développement altéré des poumons et du cœur. Dans les années qui suivent ils développent des insuffisances respiratoires voire des handicaps neurologiques ou des syndromes métaboliques ». Pour évaluer les coups indirects, y compris l’impact sur les parcours socioprofessionnels des parents et de l’enfant, les travaux vont se poursuivre sur la base des données de la cohorte Elfe (Étude longitudinale française depuis l’enfance) et de l’étude Epipage.

10 % des naissances, 30 % des morts nés

Les enfants RCIU représentent 10 % des naissances, 30 % des morts nés et presque un quart des 7 % d’enfants prématurés qui naissent chaque année en France. Bien que fréquente, cette pathologie est très mal diagnostiquée : « La seule méthode pour repérer une restriction de croissance fœtale est de remarquer une cassure dans la courbe de croissance entre les échographies », explique la pédiatre Danièle Evain-Brion qui coordonne du groupe de travail sur l’évaluation médicoéconomique du RCIU. « On est très mauvais dans ce domaine en France puisque seulement 20 % des cas de RCIU sont diagnostiqués. » La directrice de la Fondation PremUP insiste donc sur le besoin de recherche de marqueurs précoces, mais aussi sur la compréhension de la pathologie : « La plupart des cas sont causés par un dysfonctionnement du placenta, mais on sait encore très peu de choses sur ce qui se passe réellement. » Pour l’instant, la seule réponse possible en cas de diagnostic prénatal d’un RCIU, est le déclenchement d’un accouchement prématuré pour permettre au nourrisson de terminer sa croissance dans un milieu contrôlé.

Damien Coulomb

Source : Le Quotidien du Médecin: 9330