Brève

Véronique Trillet-Lenoir (Liste Renaissance) « L’écologie est une belle cause, elle nous parle surtout de notre santé »

Par
Publié le 25/04/2019
L’avenir de l’Europe mobilisera-t-il les électeurs français ? Pas si sûr, si l’on en croit les premiers échos de campagne. Raison supplémentaire pour donner la parole aux représentants santé des principales listes.
VTL

VTL

Quelles sont les mesures concernant la santé ?

Il n'y a pas de mesures spécifiques pour une raison simple : la santé est essentiellement une compétence des Etats membres et plus indirectement une compétence de l’Union européenne. En revanche, il y a des sujets santé dans toutes les politiques de l’Europe : la recherche (l’intelligence artificielle), la sécurité alimentaire et la qualité de l’air et de l’eau. Et c’est extrêmement transversal. Rappelons ce qu’a écrit Emmanuel Macron dans sa tribune :« Je veux une Europe qui protège, qui libère, qui progresse ».

Comment décliner ce programme en santé ?

En ce qui concerne la protection en santé, j’y vois la santé environnementale avec toutes les problématiques liées à la pollution atmosphérique. L’eau que l’on boit, l’air que l’on respire relèvent des compétences européennes. Par ce lien, on lutte contre les pathologies respiratoires et les maladies cardiovasculaires. Pas plus que le nuage de Tchernobyl ne s’est arrêté à la frontière française, les particules fines ne vont respecter les contrôles douaniers. Il faut donc envisager un espace Schengen de la santé en termes de défense contre la pollution atmosphérique. Sur les perturbateurs endocriniens, des avancées ont été réalisées. Mais il reste encore beaucoup à faire, pas seulement sur le glyphosate et les pesticides mais sur leur présence et leur toxicité dans les additifs alimentaires, les cosmétiques, l’eau potable. On doit également mentionner le dérèglement climatique à l’origine d’une pullulation d’insectes porteurs d’arbovirus, dengue, chikungunya qui se retrouvent jusqu’en Europe du Nord. On ne va pas ici lutter contre ces maladies, comme le pense le Rassemblement national, en installant des moustiquaires aux frontières. Ce n’est pas l’immigration humaine qui serait à l’origine de ces pathologies. Elles sont la conséquence du dérèglement climatique.

Qu’est-ce qui vous distingue d’Europe écologie les verts (EELV) ?

Sur la liste des verts, il n’y a pas de spécialiste de la santé. L’écologie est une belle cause. Mais elle tourne un peu sur elle-même si on n’y intègre pas les dimensions de la santé, de l’agriculture ou même de l’éducation. Je défends le concept de santé globale où la santé humaine, animale et végétale constitue une entité avec laquelle on doit composer. D’où ma préférence pour le terme « santé durable », santé globale. S’il en faut une preuve, au sein des écologistes, on trouve des antivaccins. La sécurité alimentaire est une autre priorité. Contrairement aux idées reçues, la France n’est pas en retard. Il faudrait porter le Nutri-score, voire un Toxi-score au niveau européen.

Est-ce au niveau européen qu’il faudrait fixer le prix des médicaments ?

Oui bien sûr. L’Union européenne est un lieu d’influence forte pour tous les lobbies et pas seulement ceux de la santé. On y trouve les anti-vaxs, les diffuseurs de fake news. On luttera en impliquant les associations de patients et de citoyens engagés. Ce sera un combat de long terme. Si l’on revient au prix du médicament, les industriels ont la vie belle. Ils négocient pays par pays. Le prix du médicament est fixé non pas sur la valeur mais sur la soutenabilité du système de protection sociale. D’où les dérives et les iniquités d’accès. Comment y mettre un terme ? En s’y prenant à 28, avec une voix suffisamment forte afin de négocier à la baisse. Cela s’est déjà produit à l’échelle mondiale avec l’hépatite C. Mais il faut aussi évoquer les pénuries de médicaments. Une constatation s’impose. La production d’un grand nombre de principes actifs est réalisée en dehors de l’Union européenne. Nous sommes tributaires de ces ruptures de chaînes. Pourquoi ne pas rapatrier en Europe des lieux de production ?

Faut-il accroître les compétences du commissaire européen à la santé ?

L’urgence serait surtout d’accroître le rôle du Parlement européen en matière de santé. La voix de la santé publique aujourd’hui ne porte pas. La plupart des sujets de santé qui préoccupent les citoyens sont des sujets régaliens comme les déserts médicaux où l’Europe n’est pas compétente.

Vous n’évoquez pas la recherche.

On y arrive. Dans l’Europe qui protège, il faut ajouter les grandes mesures de prévention. Dans l’innovation en santé, là aussi on peut saluer certaines réalisations comme les programmes de recherche sur les maladies rares qui incluent certains cancers, je suis particulièrement sensible aux problèmes des cancers pédiatriques. L’échelle européenne est ici la seule possible comme pour d’autres thématiques comme l’intelligence artificielle, la génomique et l’éthique autour des big data. Ces programmes doivent être par ailleurs transdisciplinaires et inclure des physiciens, des mathématiciens, impliquer des représentants des patients et des chercheurs en sciences humaines.

Une fois élue, au sein de quel groupe allez-vous vous inscrire ?

Les négociations sont en cours. L’idée est de créer un groupe rassembleur qui a vocation à mobiliser au centre de l’Europe, à l’exclusion des extrêmes, les compétences venues de tous bords. L’idée est de casser le duopole Parti populaire européen/socialistes, à l’image de ce qu’a fait le président Macron en France.

Enfin, avez-vous commis des erreurs de jeunesse ?

Je n’ai rien identifié à ce jour de ce qui pourrait être qualifié d’erreur. Je reconnais avoir fait le clown lors de la revue de l’internat. Ma jeunesse déjà loin a été studieuse et potache.


Source : lequotidiendumedecin.fr