Lorsque le DIU Soigner les soignants a été proposé en 2015, la plupart des étudiants avaient – tout comme leurs enseignants – une sensibilité particulière pour ce sujet, du fait soit de leur parcours personnel soit d’une implication ordinale ou au sein des URPS. Quatre années plus tard, le DIU fait toujours de plein d’étudiants et les inscriptions pour la 5e session ont déjà débuté.
Invité à une des sessions de formation, le « Quotidien » a rencontré les coordonnateurs du DIU, le Pr Eric Galam et le Dr Jean-Jacques Ormières et la quatrième promotion d’étudiants.
Les infatigables coordonnateurs mettent en avant l’aspect novateur d'une formation dont ils estiment même qu’elle permet de définir chaque jour les contours d’un nouveau métier et d’une nouvelle spécialité médicale. Comme l'explique le Pr Eric Galam, « grâce à nos étudiants, nous en explorons les différentes facettes. Et la pluriprofesionnalité de la promotion actuelle d’étudiants (IDE, psychologues, pédicure-podologue…) nous enrichit encore ».
Interrogés sur leurs motivations à s’inscrire, les participants de cette première promotion pluridisciplinaire se montrent portés par les mêmes buts que leurs confrères des promotions précédentes : éviter de revivre un drame personnel, proposer de l’aide aux confrères. Mais – et c’est nouveau – l’idée de vouloir faire changer le regard des autres sur les professions de santé, en particulier exercées à titre libéral, devient un axe majeur.
Un curriculum privé
C’est parce que sa patientèle était constituée à 60 % de soignants et qu’il a perdu un confrère proche d’un suicide, que le Dr Jean-Jacques Ormières, coordinateur du DIU, a choisi de s’impliquer dans la mise en place d’une formation de soignant de soignants. La perte d’un confrère est aussi mise en avant par certains des étudiants de la promotion 2019. « J’ai perdu l’une de mes collègues qui s’est suicidée dans son cabinet », dit l'un. « J’ai vécu personnellement le suicide d’un interne héroïnomane… », avance l'autre.
Pour le Pr Eric Galam, former des soignants qui soient capables d’aider et d’accompagner d’autres soignants peut permettre d’éviter que des pairs deviennent « malades » à cause de leur travail et quittent leur fonction de soignant (comme c’est le cas de beaucoup d’IDE actuellement).
De ce point de vue, les étudiants sont au diapason de leurs formateurs : ils ont envie de transmettre, de prévenir, d’accompagner, d’apporter une aide adaptée… Et pour cela, ils cherchent à disposer de réseaux et d’outils utilisables au quotidien quand ils doivent – souvent en urgence – proposer une aide à un confrère en difficulté aiguë ou chronique.
Souffrance ressentie
Si certains étudiants mettent en avant leurs difficultés personnelles (pressions administratives de la CPAM, par exemple), ils ont tous pour finalité d’aider avant tout l’autre. Ce dernier étant aussi le miroir de leurs propres difficultés voire souffrances au travail : maltraitance médiatique, agressivité verbale, physique ou virtuelle…
C’est en faisant prendre conscience aux confrères qu’ils souffrent et ne doivent plus travailler dans la souffrance que les lignes pourront peut-être bouger, espèrent certains étudiants : « Les soignants ne peuvent plus être des victimes d’une société qui les maltraite avec la complicité des pouvoirs publics. Nous ne devons plus nous laisser faire et nous devons changer le regard de la société sur notre fonction », explique l'un d'eux.
Un engagement ordinal ou au sein des URPS
L’engagement vis-à-vis des confrères par le biais du tissu local des Ordres ou des URPS a été, depuis la première promotion du DIU, un élément de motivation essentiel des inscrits au DIU. C’est aussi le cas des initiateurs de la formation et d’une grande part des formateurs qui reconnaissent néanmoins qu’à ce jour les pistes d’action proposées restent centrées sur la prévention secondaire et tertiaire. Ils imaginent que dans les prochaines années une sensibilisation à la prévention primaire sera essentielle et qu’elle pourra être portée par les Ordres et les URPS.
Une partie importante des étudiants a d’ailleurs été sensibilisée à l’exigence du DIU dans le cadre de leur activité auprès de leurs confrères. Comme l’explique le Dr Jean-Jacques Ormières, « les changements actuels dans l’organisation des soins sont à l’origine d’une pathologie psychosociale d’adaptation au changement : les représentants des soignants ne doivent plus seulement aider leurs confères en difficultés, ils doivent aussi proposer des pistes de prévention en amont avant même que la souffrance s’installe ».
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