Mélanie, 4 ans, présente depuis 48 heures un prurit important de son œil droit qui fait penser à une conjonctivite, ainsi qu’un prurit cervical (photo 1). En fait avant l’apparition de cette symptomatologie, elle s’est amusée avec des chenilles qui étaient « en rang » devant sa maison (photo 2). Sa mère soupçonne une irritation secondaire aux chenilles, d’autant plus qu’une forte tramontane soufflait. En sortant de chez Mélanie, nous notons la présence de nombreuses formations tissées au sein des pins situés autour de sa maison.
LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE
> La chenille processionnaire est la larve d’un papillon de nuit Thaumetopea pityocampa. Le cycle biologique de cet insecte est annuel, et peut se diviser en plusieurs étapes :
- mi-juin, les papillons de la procession sortent de terre. Mâles et femelles s’accouplent ; les mâles meurent 2 jours plus tard ; La femelle s’envole après cet accouplement, et dépose près de 200 œufs sur les aiguilles de pin. Elle meurt ensuite ;
- les chenilles éclosent entre 30 et 45 jours après la ponte. Elles profitent de leur environnement, et se nourrissent d’aiguilles de pin ; un abri à l’approche de l’hiver se constitue sous la forme d’un cocon géant en soie ;
- au printemps, la colonie conduite par une femelle quitte le « cocon », et chemine vers la terre ferme. À cette période, il est fréquent de rencontrer la procession formée par les chenilles rattachées les unes aux autres en longue file. Plusieurs jours après leur pérégrination, elles s’enfouissent dans le sol ;
- deux semaines après, les chenilles tissent un cocon individuel, et se transforment en chrysalide ; laquelle se transforme en quelques mois en papillon, et le cycle se poursuit….
[[asset:image:10096 {"mode":"small","align":"right","field_asset_image_copyright":["DR"],"field_asset_image_description":[]}]]> La femelle choisit généralement un pin (pin d’Alep, laricio de Corse, Salzman, maritime, sylvestre, pin noir d’Autriche), mais aussi le cèdre pour pondre ses œufs. Ces derniers sont déposés en rangées parallèles, et par paquets de 150 à 320 pour former un manchon de couleur argentée, et recouvert d’écailles sur les rameaux ou les aiguilles de pin. La présence de ces chenilles sur le territoire français est subordonnée à la présence de ces espèces de résineux (photo 3).
> La cartographie de cette infestation évolue considérablement au fil des années. Autrefois présentes dans le sud de la France, les chenilles processionnaires se retrouvent maintenant beaucoup plus au nord (cartographie).
> Cliniquement chez l’homme les poils de la chenille processionnaire sont urticants. En fait, ils sont très légers, et se détachent facilement dès que la chenille est irritée ou excitée, mais aussi dès que certaines manifestations climatiques surviennent (vent très violent notamment). Dès que le contact avec le sujet a lieu, le poil se brise, et une substance urticante est libérée : la thaumétopoéine.
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LES MANIFESTATIONS CLINIQUES
Elles varient en fonction des sites touchés.
La peau
Dans ce cas, il est noté de très importantes démangeaisons avec une éruption douloureuse. Souvent cette réaction se cantonne aux parties découvertes. Les substances urticantes se répandent facilement grâce à la sueur, mais aussi le grattage et le frottement.
Les yeux
Quelques heures après un contact, on peut observer une conjonctivite parfois très importante. Dans certaines situations extrêmes, il est possible de voir une évolution vers une cécité.
Au niveau des voies respiratoires
Les poils urticants génèrent une irritation des voies respiratoires. Dans ce cadre, nous observerons des éternuements, des douleurs pharyngées, des bronchospasmes.
Au niveau digestif
Des glossites, chéilites sont mises en évidence, mais aussi une hypersalivation. Parfois le tube digestif est irrité, et dans ce contexte, il est possible de rencontrer des douleurs abdominales, et des nausées.
Un contact répété avec ces poils peut favoriser des réactions, qui progressivement deviennent plus importantes, et donner dans certains cas un choc anaphylactique.
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LES TRAITEMENTS
> Le traitement préventif consiste à utiliser des vêtements de protection dès lors qu’un contact possible avec les chenilles (jardinier notamment) sera possible.
Une éradication des nids dans les résineux est également une priorité (traitement phytosanitaire biologique ou chimique, ou lutte mécanique en coupant et brûlant les nids).
En ce qui concerne les poils qui se dispersent avec le vent, il faut éviter de sécher le linge à l’extérieur d’une zone infestée durant les périodes allant de mai à septembre, ne jamais laisser un enfant à proximité d’une zone « suspecte ».
> À titre curatif, le traitement repose sur les antihistaminiques surtout, et sur le lavage abondant de la peau qui est en contact avec ces poils urticants.
En ce qui concerne les yeux, on favorisera également un nettoyage au sérum physiologique, et au moindre doute quant à la présence de nombreux poils, on confiera le patient à l’ophtalmologue pour qu’il effectue un examen minutieux. Ainsi, il pourra favoriser l’exérèse de poils profondément ancrés.
Pour les voies respiratoires, outre les antihistaminiques, l’utilisation de corticoïdes inhalés, ou d’aérosols pourra être conseillée dans le cas d’un bronchospasme.
> en ce qui concerne Mélanie, nous avons administré un traitement antihistaminique per os et local (gouttes ophtalmiques). Cela a permis une amélioration clinique en 24 heures.
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