Presque six médecins sur dix (58 %) déclarent avoir été affectés par un problème de santé mentale (dépression, burn out, pensées suicidaires, etc.) au cours des dernières années. C’est le principal enseignement de la quatrième vague de l’Observatoire Odoxa-MNH* sur l’état de santé des soignants et des personnels hospitaliers, rendu public ce mercredi 6 novembre 2024.
Dans le détail, la santé mentale des médecins est davantage dégradée que celle des infirmiers (56 %), des aides-soignantes (55 %) et surtout de l'ensemble des Français (41 %). L’écart entre le ressenti de la profession médicale et celui de la population générale atteint ainsi 17 points sur ce critère déclaratif de la santé mentale.
L’enquête révèle que l’ensemble des indicateurs de santé publique (sommeil, nutrition, addictions, etc.) sont particulièrement détériorés chez les professionnels de santé. Un soignant sur deux (54 %) déclare des comportements nocifs : « au moins une fois par semaine », 35 % boivent de l’alcool, 24 % fument du tabac, 16 % prennent des tranquillisants ou des somnifères et 2 % fument du cannabis.
Les soignants sont également plus nombreux que les Français en général à consommer toutes les semaines (89 % vs 78 %) des produits gras, sucrés ou salés. Inversement, ils sont un peu moins nombreux que leurs concitoyens à pratiquer du sport ou une activité physique de façon hebdomadaire (59 % vs 62 %).
Violence au travail, incivilités et charge horaire
Ces comportements néfastes pour la santé peuvent en partie s’expliquer par les conditions de travail particulières des blouses blanches. Ainsi, 56 % des sondés expliquent avoir vécu au moins une situation de violence au travail. C’est 18 points de plus que les autres Français dans la vie active (38 %).
Dans le milieu sanitaire, ils sont également beaucoup plus nombreux à faire face à des incivilités (45 % vs 30 %) voire à de l’agressivité physique (31 % vs 27 %) de leurs patients que les autres actifs confrontés à leurs clients ou leurs fournisseurs. Par ailleurs, trois soignants sur quatre (76 %, soit 25 % de plus que pour la moyenne des Français) déplorent un volume de travail trop important.
Plus stressés, les soignants sondés sont nettement moins satisfaits de leur équilibre vie professionnelle/vie personnelle que les autres actifs en emploi (54 % vs 75 % en population générale). Et là encore, cet écart est particulièrement marqué chez les médecins, à leur détriment. Ces derniers sont majoritaires (54 %) à déclarer un ressenti négatif au sujet de leur équilibre général de vie alors que les Français actifs ne sont que 25 % à exprimer ce mécontentement.
Amélioration du moral des troupes
Dernier constat, un peu moins sombre : si les professionnels de santé sont toujours proportionnellement moins heureux au travail que les autres salariés (64 % de satisfaits vs 77 %), l’enquête révèle une amélioration marquée de leur état d’esprit après des années de dégradation (+10 points en deux ans et même +26 points en quatre ans).
Alors que la quête de sens au travail traverse tous les pans de la société, la majorité des médecins affichent envers et contre tout une satisfaction globale à exercer leur métier (68 %), devant les infirmières (65 %) et les aides-soignantes (60 %). Mais c’est tout de même neuf points de moins que l’ensemble des Français en emploi.
* Enquête réalisée par Odoxa pour la MNH et Le Figaro Santé, avec le concours scientifique de la Chaire Santé de Sciences Po, auprès d’un échantillon de 1005 Français interrogé par Internet du 2 au 3 octobre 2024 et auprès d’un échantillon de 1541 professionnels de santé interrogé par Internet du 30 septembre au 14 octobre 2024. La MNH est actionnaire du Quotidien.
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