Les récentes élections des délégués à la caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF) s’étaient traduites par la large victoire des candidats soutenant le Dr Gérard Maudrux. Mais l’actuel président de la CARMF est aujourd’hui menacé de devoir quitter ses fonctions.
Un projet de décret présenté par le ministère de la Santé (DSS) prévoit d’interdire à tout retraité de présider une caisse de retraite de profession libérale. Chirurgien retraité, le Dr Maudrux serait ainsi écarté de la présidence de la CARMF qu’il occupe depuis 1997, et ne pourrait même plus être membre du bureau.
Traitement de faveur ?
Ce texte prévoit en outre de limiter la durée du mandat de président à 6 ans, durée déjà allègrement dépassée par le Dr Maudrux. Contacté par « le Quotidien », l’intéressé s’estime personnellement visé par ce décret.
« À mauvais texte, mauvais prétexte. Je suis le seul retraité président d’une caisse de profession libérale, c’est un peu fort de changer le code de la Sécu pour un seul homme ! » Le praticien s’étonne que seules les professions libérales bénéficient de ce traitement de faveur. « Si les mêmes règles étaient appliquées aux présidents de l’Assemblée, du Sénat, du Conseil constitutionnel ou du Conseil d’État, tous perdraient leur mandat comme des milliers de maires, députés et sénateurs. »
Liberté de parole
Le chirurgien se dit victime de la « vengeance des énarques » après de récentes prises de position sur la « suradministration » de la France. Les rapports difficiles qu’entretient le Dr Maudrux avec la CSMF et MG France ne seraient également pas étrangers à la préparation de ce décret, selon lui.
« Ce texte répond à une demande répétée depuis des années de deux syndicats qui n’arrivent pas à prendre le pouvoir dans la caisse par les voies démocratiques, malgré les élections tous les 3 ans », a-t-il écrit dans un récent courrier.
Le chirurgien retraité est persuadé que sa « liberté de parole dérange ». D’ailleurs, observe-t-il, le projet de décret prévoit que la responsabilité de la communication des caisses soit confiée à leur directeur et non plus à leur président...
Paranoïa
Interrogé par « le Quotidien », le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF, réfute tout interventionnisme. « Gérard Maudrux donne à la CSMF et à MG France un pouvoir qu’ils n’ont pas. Ce n’est pas nous qui préparons les projets de décret ». Le patron de la Confédération remarque que la réforme s’applique à toutes les professions libérales et non pas aux seuls médecins. Se prononçant sur le fond du projet de décret, le Dr Ortiz trouve « logique » que les retraites soient dirigées par les gens qui cotisent.
MG France est sur la même longueur d’ondes. « Evitons les lectures paranoïaques ! Le problème n’est pas l’avenir du président de la CARMF mais l’avenir de la retraite des médecins libéraux à un bon niveau », clame son président le Dr Claude Leicher. Citant un récent rapport de l’IGAS qui n’a pas épargné la gestion de la CARMF, le Dr Leicher estime que Gérard Maudrux porte une « lourde responsabilité » dans « la réforme brutale des régimes de retraite des médecins ».
A l’instar de la FMF, le SML apporte son soutien au Dr Maudrux. « Nous ne pouvons laisser passer un tel décret, a déclaré son président, le Dr Éric Henry. S’il en venait à être promulgué, la question d’en appliquer les termes à tous les politiques de France se devra d’être posée ! » Selon le Dr Jean-Paul Hamon, patron de la FMF, l’assurance-maladie et certains syndicats avaient depuis plusieurs années le projet de « neutraliser » le président de la CARMF, mais ce dernier a toujours été très largement réélu. « Ils ne savaient pas comment le faire taire, l’éliminer de cette façon n’a rien de glorieux », lâche le généraliste de Clamart.
Un recours pour la forme
Le Dr Maudrux, dont le mandat de trois ans se termine officiellement en septembre, indique qu’il déposera un recours devant le Conseil d’État. Pour la forme. Il sait qu’il n’aura vraisemblablement pas de réponse avant plusieurs années.
Ce recours n’étant pas suspensif, il vit sans doute ses dernières semaines à la présidence de la CARMF. « Il est moins déshonorant d’être viré par des gens malpropres que par les électeurs », conclut-il avec son franc-parler habituel.
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