« Fake médecines » : dix praticiens signataires d'une tribune attaqués par des syndicats de médecines alternatives

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Publié le 12/04/2018

La vive polémique sur les « fake médecines » prend un tournant juridique et disciplinaire, qui risque de relancer durablement cette controverse.

Alors que la tribune dénonçant dans « Le Figaro » les thérapies dites « alternatives » – et en particulier l’homéopathie – continue d’engranger des signatures (1 700 à ce jour), une vague de plaintes disciplinaires ont été déposées au conseil de l’Ordre contre dix signataires.

Ces derniers sont attaqués pour des propos jugés « contraires aux principes déontologiques de confraternité, de considération de la profession, de moralité, de probité et de dévouement » par plusieurs syndicats professionnels* représentant les médecines alternatives et à exercice particulier (homéopathes, mésothérapeutes, etc.). Ces organisations ont perçu dans la tribune une « inadmissible agression idéologique » et une « incitation à l’intolérance ».

Un débat confraternel devant les tribunaux ?  

Ces plaintes au conseil de l'Ordre constituent une réaction « à la violence des propos tenus » explique le Dr Meyer Sabbah, généraliste MEP à Grasse et président de l’Union collégiale, un des syndicats à l'initiative des plaintes. « La démarche des signataires est insultante et très anti-confraternelle : les signataires s’attaquent aux fake médecines, mais aussi aux médecins, désignés comme charlatans, et à l’Ordre en l’accusant de connivence », s’indigne le généraliste acupuncteur.  Les fédérations professionnelles plaignantes attendent des excuses publiques « à la hauteur des attaques », comme « préalable à l’ouverture d’un débat confraternel », souligne le président de l’Union collégiale.

Ce débat est également attendu par les signataires visés. Le Dr Antoine Ospital, généraliste à Anglet, signataire de la tribune, et convoqué ce jeudi au conseil départemental de l’Ordre des médecins des Pyrénées-Atlantiques, à Bayonne, se dit « surpris et dépité qu’on en arrive sur le terrain judiciaire alors qu’on aurait aimé un débat scientifique ». 

Selon lui, la fameuse tribune contre les fake médecines a été rédigée sans agressivité à l’égard de ses confrères : « Ce ne sont pas les personnes que la tribune met en cause, mais bien les pratiques », précise le généraliste, rappelant que la plainte ne porte pas sur les aspects scientifiques. « On ne veut pas interdire l’homéopathie mais bien préciser que c’est un champ différent de celui de la médecine. »

Vers une seconde vague de plaintes 

Sur leur site, les signataires se félicitaient le 28 mars de « diverses avancées » suite à la médiatisation de leur tribune, et notamment de la publication par la Direction de l’information légale et administrative (service du Premier ministre) d’une mise en garde vis-à-vis des pratiques de soins non conventionnelles. Ils avancent même une proposition : « transférer l’enveloppe allouée actuellement au remboursement de pratiques non validées scientifiquement, dont les 56 millions d’euros d’homéopathie, vers des soins à l’efficacité connue et des mesures d’éducation sanitaire, de prévention, et valorisant le temps soignant. »

Dans son intervention sur RMC ce jeudi, la ministre de la santé Agnès Buzyn apporte une fin de non recevoir à cette piste en se disant favorable au maintien du remboursement de l'homéopathie, une médecine qui est « probablement un effet placebo » mais « ne fait pas de mal ».  

Pour l’heure, dix plaintes ont été déposées mais une seconde vague de procédures pourrait être lancée. « Nous attaquons les médecins qui se sont exposés médiatiquement pour défendre cette tribune et les premiers signataires », explique au « Quotidien » le Dr Sabbah (Union collégiale). « Pour les prochaines plaintes, nous envisageons un tirage au sort parmi les signataires. »

La twittospère en émoi

En attendant, les signataires de la tribune, convoqués ou non, n’ont pas manqué de réagir sur Twitter.

 


Source : lequotidiendumedecin.fr