Après un accueil frileux des praticiens libéraux craignant de voir une intrusion des paramédicaux dans leur pré carré, le dossier des infirmiers en pratique avancée (IPA) avance à grand pas.
Emmanuel Macron a confirmé le cap la semaine dernière : cette « forme moderne d'exercice » permettant à des professionnels paramédicaux de se voir reconnaître des compétences relevant réglementairement des médecins sera « enfin possible ». Pour commencer, seize universités devraient recevoir leur accréditation d'ici à novembre pour former ces « super-infirmiers » dont le diplôme d'État sera reconnu au grade master (à l'issue de quatre semestres validés).
Lors d'une table ronde organisée par l'Ordre infirmier, le Pr Antoine Tesnière, conseiller santé au ministère de l'Enseignement supérieur, a rappelé le cadre de la formation : une spécialisation dès la deuxième année de master pour répondre aux trois champs d'intervention des IPA prévus par décret (maladie rénale, oncologie et pathologies chroniques stabilisés dont la prévention et polypathologies courantes en soins primaires).
Plusieurs textes réglementaires ont été publiés cet été pour préciser les activités de ces IPA aux compétences élargies par rapport à celles de l'infirmier diplômé d'État mais aussi le rôle central et la tutelle du médecin traitant. « C'est un nouveau métier. Les IPA sont dans un champ transversal, largement ouvert sur la ville et il n'y a pas de concurrence avec les autres infirmières », assure le Pr Tesnière.
Protocole
Ces propos apaisants n'empêchent pas les médecins et les infirmiers de s'interroger sur ce nouveau métier, les éventuelles querelles de frontière et les responsabilités de chacun. Ainsi, dans le cadre de l'exercice infirmier en pratique avancée, un « protocole d'organisation », très balisé, a été retenu, à la demande de la profession médicale. Mais quelle différence avec un protocole de coopération classique entre deux professions (ophtalmologistes et orthoptistes par exemple) ?
Guy Boudet, représentant de la Direction générale de l'offre de soins (DGOS, ministère), précise que les protocoles de coopération habituels sont encadrés et validés par la Haute autorité de santé(HAS). En revanche, le protocole d'organisation sera formalisé dans le cadre du travail en équipe médecins/IPA. Il établira les modalités de prise en charge des patients confiés à l'IPA, les domaines d'intervention, la régularité des échanges entre le médecin et l'infirmier ou encore les conditions de retour du patient vers le praticien. « C'est un élément de transparence par rapport aux patients mais aussi de cadrage du champ de responsabilités spécifiques de chaque acteur », affirme-t-il.
Président de MG France, le Dr Jacques Battistoni entend rassurer les généralistes : le travail de l'IPA se conçoit dans une équipe de soins primaires, dans le cadre du parcours de soins et « non dans une prise en charge individuelle par l'infirmière ».
Quel modèle ?
En revanche, le modèle économique de ce nouveau métier reste une zone d'ombre. « Les négociations conventionnelles sont pour le moment interrompues ; mais il faudra trouver une réponse qui ne reproduise pas un modèle en silo – le médecin d'un côté et l'infirmière de l'autre », met en garde le président de MG France.
Pour les IPA libérales, « on s'oriente vers un forfait plutôt qu'une rémunération à l'acte qui n'est pas adaptée au parcours de soins », avance Guy Boudet (DGOS). Et pour les IPA salariées (d'un centre de santé par exemple), il faudra trouver un statut et un cadre juridique clair.
Le gouvernement espère créer 5 000 postes d'IPA dans les équipes de soins libérales et hospitalières à l'horizon du quinquennat.
Hôpitaux de Marseille : « l’affaire Adida est une déflagration », juge le DG de l’AP-HM François Crémieux
Santé des soignants : deux prix pour valoriser l’engagement des blouses blanches pour leurs pairs
Accès aux soins psy : l’alerte de la FHF
Directeur d’hôpital, un « métier exigeant et d’engagement » dont il faut « prendre soin », plaide l’ADH