LE SUCCES est incontestable. Le BLOC, ce tout nouveau syndicat représentant les anesthésistes, les obstétriciens et les chirurgiens, a créé la surprise aux élections aux Unions régionales des professionnels de santé (URPS), instances qui vont remplacer les Unions régionales de médecins libéraux (URML). Composé de l’Association des anesthésiologistes libéraux (AAL), du syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France (SYNGOF) et de l’Union des chirurgiens de France (UCDF), le BLOC a obtenu 57,9 % des suffrages dans les deuxième collège AOC (anesthésistes, obstétriciens, chirurgiens), loin devant les centrales syndicales classiques. Le nouveau syndicat a réalisé des scores spectaculaires dans certaines régions, notamment en Bourgogne (72 %), Champagne-Ardennes (72 %), Rhône-Alpes (69 %), Alsace (67 %), Ile-de-France (63 %) ou Aquitaine (60 %). Grâce à ce succès, le BLOC va décrocher 92 des 141 sièges réservés aux praticiens du collège AOC dans les URPS. Surtout, ce tout jeune syndicat est désormais considéré comme un syndicat représentatif, habilité à négocier avec les pouvoirs publics, l’assurance-maladie ou les organismes complémentaires.
« Avec cette victoire, nous allons pouvoir faire entendre, aux niveaux régional et national, la voix des spécialités des plateaux techniques lourds qui jusque-là était assez peu pris en compte par les centrales syndicales classiques », indique le Dr Henry Mouysset, anesthésiste libéral et co-président du BLOC (au même titre que le Dr Philippe Cuq pour les chirurgiens et le Dr Jean Marty pour les obstétriciens).
La création du BLOC s’est faite dans la perspective de ces élections aux URPS, en s’appuyant sur un fort mécontentement d’un certain nombre d’anesthésistes, d’obstétriciens et de chirurgiens. « Cela fait plusieurs années que nous disions que ce discours sur une médecine libérale unique et indivisible ne menait nulle part. Certes, nous sommes tous des docteurs en médecine, mais les praticiens qui exercent dans les blocs opératoires ont un exercice très différent des généralistes ou des autres spécialistes. C’est pour ne pas mourir que nous avons bougé », affirme le Dr Cuq, très en pointe ces dernières années pour faire entendre les revendications des chirurgiens libéraux.
Une stratégie à deux niveaux.
C’est en partant du même constat qu’un petit groupe d’anesthésistes ont créé en 2000 l’AAL. « Notre objectif initial n’était pas de créer un syndicat mais rapidement, l’association a connu un grand succès puisqu’elle a rassemblé plus de 700 adhérents, précise le Dr Mouysset. Dans la perspective des élections aux URPS, il nous a semblé qu’il fallait franchir le pas et transformer l’association en syndicat puis faire alliance avec nos amis du SYNGOF et de l’UCDF pour créer cette union syndicale du BLOC ».
Grâce à son succès, le BLOC va pouvoir maintenant agir au niveau régional et national. « Cette stratégie, à deux niveaux, est importante. Aujourd’hui, une bonne partie de la politique de santé va s’élaborer au niveau des URPS et des Agences régionales de santé (ARS). C’est là que vont se prendre des décisions sur les restructurations des cliniques ou les autorisations pour faire tel ou tel type de chirurgie. Nous souhaitons donc être des interlocuteurs privilégiés des ARS pour tout ce qui va concerner nos professions et nos cliniques pour ne pas qu’on nous déplace comme des pions en invoquant des raisons économiques », explique le Dr Mouysset.
Au niveau national, le BLOC entend poursuivre le combat conduit ces dernières par les trois syndicats en particulier sur les tarifs, les problèmes de responsabilité civile ou le secteur d’exercice. « Une de nos revendications portera sur une revalorisation de nos tarifs et la possibilité de faire des dépassements d’honoraires. Notre objectif n’est pas de gagner davantage, mais de pouvoir travailler dans de meilleures conditions. Cela fait une quinzaine d’années que nos honoraires n’ont pratiquement pas bougé alors que, dans le même temps, nos charges (assurances, secrétaires, infirmières anesthésistes, etc.) ont grimpé en flèche. Il ne faut pas se focaliser, comme le font certains, sur notre chiffre d’affaires. Ce qu’il faut regarder, c’est le BNC (bénéfice non commercial) qui ne progresse plus », indique le Dr Mouysset, peu convaincu par l’intérêt d’un secteur optionnel. « De notre point de vue, l’objectif était de permettre aux praticiens du secteur 1 de faire des dépassements d’honoraires. Tel qu’il a été créé, il vise surtout à limiter les dépassements chez les praticiens du secteur 2 », indique le Dr Mouysset.
Comme le soulignent le Dr Cuq et le Dr Mouysset, un autre dossier prioritaire sera bien sûr celui de la responsabilité professionnelle. « La situation actuelle est intenable. Si demain, on endort un enfant de cinq ans pour une amygdalectomie et que celui-ci pour une raison X ou Y fait une hypoxie et qu’il reste gravement handicapé, on reste sous la menace d’une action judiciaire jusqu’à ses 18 ans. Le problème est que nos assurances ne nous couvrent que sur une période de dix ans après notre cessation d’activité. Résultat, non seulement, on peut très bien finir ruinés sur nos bien propres, mais aussi, après notre décès, laisser à nos ayant-droits l’obligation de verser des dommages et intérêts pouvant se chiffrer à plusieurs millions d’euros. Cette situation est absolument inacceptable », estime le Dr Mouysset.
D’après un entretien avec le Dr Philippe Cuq et le Dr Henry Mouysset, co-présidents du BLOC.
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