Hôpital maltraité, patients en danger ? Cette phrase prend malheureusement son sens au CHU de Nantes, à en croire les alertes de la CGT et de plusieurs soignants. En chirurgie cardiaque, psychiatrie et gérontologie, le manque de personnel aurait de graves conséquences pour les malades. Des professionnels de santé exerçant dans ces services ont témoigné en ce sens, lors d’un point presse organisé par la CGT lundi 19 septembre.
Manque de personnel
La chirurgie cardiaque nantaise était déjà en souffrance depuis plusieurs années, sur fond de manque de personnel médical et paramédical. Mais un point critique a été atteint : en chirurgie cardiaque pédiatrique, les délais d’intervention sont passés de trois mois en moyenne à six, voire huit mois.
Plusieurs enfants atteints d’une malformation cardiaque congénitale – notamment d’une tétralogie de Fallot – ont vu leur opération reportée de plusieurs mois, avec un risque de perte de chance. « Les chirurgiens cardiaques exerçant au CHU de Nantes se voient limiter leurs interventions au bloc opératoire à une demi-journée par semaine, faute de personnel en nombre suffisant, précise le Dr Jean-Luc Landas, médecin réanimateur retraité et membre du collectif nantais pour le droit à la santé et à la protection sociale. Il est inacceptable pour eux de ne pas pouvoir opérer leurs patients, notamment des enfants, dans des délais raisonnables. »
Dans ce contexte, un chirurgien cardiaque menace de démissionner si la direction ne lui donne pas plus de vacations opératoires. Ces dernières années, plusieurs chirurgiens de toutes spécialités ont déjà présenté leur démission après s'être vus refuser des vacations opératoires supplémentaires.
Plus de 100 ados hospitalisés en psychiatrie adulte
En psychiatrie, la situation qui était déjà tendue au pic de l’épidémie de Covid 19 – en raison d’une aggravation des troubles anxieux dépressifs et des psychoses chez nombre de patients fragiles – ne s’améliore pas. En unité adulte, plusieurs suicides de patients au cours de leur hospitalisation se sont produits depuis le début de l’année 2022, alors que cette issue était auparavant exceptionnelle.
De surcroît, le nombre d’adolescents hospitalisés dans une unité de psychiatrie adulte, faute de place en pédopsychiatrie, continue à augmenter. Ils étaient 82 mineurs concernés en 2020, puis 108 en 2021 et ce dernier chiffre a déjà été dépassé au cours du premier semestre 2022. Ces jeunes patients se retrouvent hospitalisés dans des unités adultes où les tensions sont montées d’un cran, ce qui n’est pas adapté à leur âge et à leur vulnérabilité.
Bains deux fois par mois, repas en six minutes
Les agressions physiques de soignants par des patients en décompensation sont en hausse, avec trois cas décrits pour le mois écoulé au sein d’une seule unité. « Un patient a fait irruption dans le service avec une arme blanche, heureusement l’équipe a rapidement réussi à l’enfermer dans un box, où il a pulvérisé tout le matériel qui s’y trouvait, relate une infirmière de secteur psychiatrique au CHU. Un autre patient a sauté sur une infirmière et a essayé de l’étranger. Un troisième a frappé deux collègues, dont l’un a présenté sa démission les jours suivants. La situation est intenable, nous ne pouvons plus assurer nos missions de soin. »
En gérontologie, le constat est aussi accablant. L’aide-soignant venu témoigner lors de la conférence de presse va jusqu'à décrire « une maltraitance institutionnelle proche de ce qui se passe dans les établissements Orpea ou Korian ». Avec cinq aides-soignants pour s’occuper de 36 personnes âgées, il décrit des toilettes réalisées en 15 minutes maximum, des bains donnés deux fois par mois dans le meilleur des cas et des repas expédiés en six minutes.
Au-delà du constat, les demandes de la CGT et des soignants mobilisés sont inchangées : des revalorisations salariales significatives pour les personnels en poste, une reconnaissance et indemnisation des arrêts maladie pour épuisement professionnel, un plan de recrutement massif et un moratoire sur les fermetures de lits.
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