Le premier syndicat de spécialistes libéraux, l’UMESPE-CSMF, lance mercredi une « opération vérité des prix » des actes. Discipline par discipline, il s’agit de démontrer le fossé qui s’est creusé entre les tarifs opposables remboursés par la Sécu et la valeur réelle des actes médicaux. Consciente de cette situation, la CNAM a décidé, à la faveur de l’avenant 8, de valoriser l’activité clinique et de réévaluer la CCAM technique en trois étapes (2013, 2014 et 2015), grâce aux économies mobilisées sur les actes d’imagerie. Mais la profession relance aujourd’hui le débat sur le coût de la pratique, la valeur du point du travail ou le C3...
HARO sur les tarifs médicaux sous-évalués ! L’UMESPE, branche spécialiste de la CSMF, organise mercredi à Paris une journée de mobilisation de ses « verticalités » (spécialités) dans le cadre d’une « opération vérité des prix ». Objectif : démontrer chiffres à l’appui que, dans chaque discipline, y compris celles qui sont réputées les plus lucratives, il existe un décrochage intenable entre les tarifs que rembourse le régime obligatoire et la valeur réelle des actes (qui inclut le coût de la pratique, la complexité, la durée, la technicité...).
Retard.
Cet argumentaire s’est imposé depuis quelques mois. La négociation de l’avenant 8, un bras de fer de plusieurs semaines, a montré que le sujet de la régulation des dépassements d’honoraires (objectif initial de Marisol Touraine) était indissociable de celui de la faible valeur des actes de secteur I en France.
La Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM), dans un contexte financier pourtant très contraint, a d’ailleurs jugé qu’un compromis sur l’encadrement des dépassements commandait un effort non négligeable sur les tarifs de secteur I, insuffisamment honorés (lire ci-dessous). Mieux, pour la première fois, la Sécu a reconnu la nécessité d’une « revalorisation régulière » des tarifs opposables, formule inscrite dans l’avenant 8. Priorité a été donnée à l’activité clinique et à l’augmentation (en trois étapes - 2013, 2014 et 2015) de certains actes techniques jugés sous cotés, notamment chirurgicaux et en gynécologie-obstétrique. Des revalorisations gagées sur la baisse des actes d’imagerie.
Affiches.
En septembre 2012 déjà, l’UMESPE avait diffusé une affiche à destination des salles d’attente, interrogeant les patients sur le « vrai coût d’un acte médical ». Elle montrait le blocage de nombreux tarifs depuis 20 ans, période au cours de laquelle « le prix moyen de la coupe de cheveux pour homme a doublé », de 11 à 22 euros... L’opération de la cataracte, elle, est rémunérée de la même façon depuis 1990 : 271,70 euros.
Les arguments sont connus : nomenclature chirurgicale inadaptée à la hausse des charges et de la RCP, au coût de la pratique, ou encore à l’évolution des techniques ; grille de consultations obsolète et actes intellectuels sous valorisés ; maintien des revenus au prix d’une suractivité dans certaines disciplines ; facturation de dépassements en guise de « rattrapage »... « Est-il encore possible de rémunérer un acte de base à 23 euros pour des praticiens de BAC+12 », résume le Dr Jean-François Rey, président de l’UMESPE. « La vérité sur les prix, ajoute-t-il, c’est aussi considérer que la moyenne des dépassements de 60 % du tarif de l’assurance-maladie constitue la vraie valeur des actes chirugicaux ».
La proposition d’un C3 pour consultation clinique complexe.
Pour donner une valeur concrète à sa démonstration, le syndicat a fait appel à l’imagination de chacune de ses composantes pour « disséquer » sa propre activité et faire des propositions.
Côté cliniciens d’abord, outre l’utilisation plus fréquente du C2 de consultant, la mesure phare avancée par le syndicat est la création d’un C3 qui valoriserait les consultations complexes dans chaque discipline clinique, répondant à un adressage formalisé et à un contenu clairement défini (première consultation, diagnostics difficiles, échec de traitements, patient à risque, pré-hospitalisation...). « Le C3 pourrait représenter 10 % des CS en moyenne », avance l’UMESPE, qui ne chiffre pas le coût de cette mesure. Cet acte pourrait être réalisée une à deux fois par an et par patient. Mais pour certaines spécialités, une proportion beaucoup plus élevée de C3 serait possible : en médecine interne (80 %), psychiatrie (30 à 50 %), neurologie (30 %), endocrinologie (20 %)... CS, C2, C3 : l’objectif serait une hiérarchisation simplifiée dans laquelle chaque discipline trouverait son compte.
Point travail et coût de la pratique.
Côté techniciens, l’avenant 8 relance la dynamique de la CCAM, nombre d’actes dits gagnants (à revaloriser) n’ayant pas atteint leur valeur cible. Mais c’est surtout le coût de la pratiqued’une partet la valeur du point travail médical d’autre partque le syndicat voudrait voir réévalués, c’est à dire les deux indices qui font la valeur de l’honoraire dans le cadre de la CCAM. « Nous demandons l’évolution du point travail médical fixé en 2005 à 44 centimes d’euros à au moins 50 centimes d’euros en 2013 permettant une revalorisation transversale de tous les actes, de toutes les spécialités », précise le Dr Rey.
Sachant que la Sécu ne peut pas tout, le syndicat se tourne à nouveau vers les ressources des organismes complémentaires. Dans le cadre de l’avenant 8, mutuelles et assurances ont mis 150 millions d’euros sur la table, notamment ciblés sur les forfaits médecins traitants. Pour l’UMESPE, les complémentaires pourraient accompagner la revalorisation du coût de la pratique sur des actes ou protocoles identifiés (critères mesurables de qualité, accréditation...). En revanche, la CSMF reste hostile à toute forme de tarification régionale.
Marisol Touraine et Bercy qui seront destinataires de cette « opération vérité » sur les tarifs entendront-ils ces arguments ? Dans l’immédiat, c’est peu probable. Au ministère de la Santé, on estime que l’avenant 8 est un compromis équilibré et que le rattrapage d’années de blocage des tarifs ne peut se faire en quelques mois. Pour le Dr Rey, cette offensive est aussi de la « médecine préventive ».
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