L'épidémie de myopie représente un véritable enjeu de santé publique. En 2050, la moitié de la population mondiale sera myope. Face à ce constat, l'Hôpital Fondation Adolphe de Rothschild ouvrira le premier institut médical de recherche et de formation, entièrement dédié à la myopie forte, au début de l'année 2023.
Environ 40 % de la population est myope et 5 à 10 %, l'est fortement. Si la myopie faible ou moyenne se stabilise vers l'âge de 21 ans, la myopie forte (dioptrie supérieure à -6.00) progresse tout au long de la vie.
« Il s'agit là d'une véritable maladie à distinguer des myopies faibles et moyennes qui sont, pour leur part, des troubles réfractifs », souligne le Pr Ramin Tadayoni, chef de service d'ophtalmologie à l'Hôpital Fondation Adolphe de Rothschild. La myopie forte peut engendrer des complications pouvant altérer la vue définitivement et des maladies spécifiques : déchirures, décollement de la rétine, glaucomes difficiles à diagnostiquer, cataractes précoces, maladies maculaires… Elle nécessite un suivi spécialisé, chez un ophtalmologiste, tout au long de la vie. Aujourd'hui, de nombreuses questions sur la prévention et la prise en charge de la myopie forte restent en suspens.
Face à ce constat, l'hôpital Fondation Rothschild compte ouvrir un Institut médical, de recherche et de formation dédié à la myopie forte. « Ce centre - qui bénéficiera d'un bâtiment dès le début de l'année prochaine - se focalisera sur trois axes, annonce le Pr Tayadoni. Le soin et la prise en charge des patients ; la formation des praticiens spécialisés en ophtalmologie en s'appuyant sur la constitution d'une société savante ; mais aussi, la recherche et l'innovation. Il permettra de faire de la recherche à proximité des patients et de créer des réseaux de compétence au bénéfice du plus grand nombre ».
Un centre de référence
L'Institut de la myopie forte devrait accueillir près de 30 000 patients (enfants et adultes) par an en consultation de dépistage, prévention, éducation et prescriptions simples de corrections. Il prendra en charge, par ailleurs, près de 9 000 cas complexes par an. L'objectif étant de rassembler sur un même lieu les experts, les meilleurs outils de diagnostics et de thérapie, tout en développant la télémédecine et la téléexpertise. « Nous souhaitons que l'Institut de la myopie forte devienne un centre de référence pour les patients atteints de myopie en France et leur médecin ophtalmologiste », précise le Pr Tadayoni.
Cet institut doit également permettre de piloter, coordonner et structurer des projets de recherche clinique, de rééducation, réadaptation et d'innovation technologique, en lien avec les équipes de recherche fondamentale. De façon plus globale, il devrait devenir un interlocuteur expert et privilégié des instances publiques et privées pour l'ensemble des projets portant sur la myopie et ses complications : associations de patients, financeurs, tutelles, industriels, sociétés savantes, mécènes…
Prévenir et freiner la myopie chez l'enfant
La myopie, sous toutes ses formes, est en constante augmentation chez l'enfant. Il existe une prédisposition génétique. « Si l'un des parents est myope, le risque de développer ce trouble est multiplié par deux chez l'enfant. Quand les deux parents sont myopes, ce risque est multiplié par six. Une vingtaine de gènes de prédisposition à la myopie ont été dépistés », précise le Pr Tadayoni. Mais l'environnement agit également sur l'augmentation de la myopie. « En Asie, entre 80 et 96 % des adolescents entre 16 et 19 ans sont myopes, contre 40 % en France. Mais nous pourrions arriver à des résultats similaires d'ici quelques années. De fait, plus les enfants sollicitent leur vision de près (lecture, écrans…), plus ils restent à l'intérieur, sans avoir accès à la lumière naturelle, plus ils risquent de devenir myopes. Ces deux facteurs se mutualisent », affirme le Dr Gilles Martin, ophtalmologue à l’hôpital Fondation Rothschild.
Une étude publiée l'année dernière suggère que le confinement pourrait avoir aggravé la myopie chez les enfants. « Un suivi sur le long terme est, toutefois, nécessaire, pour déterminer précisément l’effet qu’aura eu cette période particulière sur l’évolution de la myopie », note le Dr Martin. S'il existe des recommandations pour prévenir la myopie et des traitements pour ralentir ce trouble chez l'enfant (collyres à base d'atropine diluée, lentilles de contact rigides, verres défocalisants), des études cliniques sont nécessaires pour comparer les différentes options de freination myopique.
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