LE QUOTIDIEN : Après 12 ans de stabilité, vous prenez la direction générale de l’Espic Diaconesses Croix Saint-Simon, dans l’Est parisien. Quel est votre profil ?
GUILLAUME CHESNEL : Mon profil est sans doute atypique dans la mesure où j’ai commencé ma carrière dans le public, mais après sept ans, j’ai basculé volontairement dans le privé non lucratif. Je suis un directeur d’hôpital “pur souche service public hospitalier”, passé par Sciences Po et l’EHESP de Rennes. Après une expérience de trois ans à Gustave Roussy, je suis devenu ambassadeur de l’offre de soin de la Fehap [fédération de référence des établissements solidaires]. J’ai pris les fonctions de DG adjoint du GH Diaconesses Croix Saint-Simon il y a trois ans.
En basculant ainsi très tôt du public vers le privé non lucratif, j’assume une mission plus politique au service d’un secteur très souvent cité en exemple mais mineur dans l’offre de soin (soit 10 % seulement). La réalité, c’est que l’État ne peut plus tout ! Et malheureusement, les Espic ont appris depuis longtemps à devoir s’aider par eux-mêmes. Je constate aussi qu’il existe toujours des inégalités de traitement avec le secteur public. Il est dommage que la situation des Espic reste préoccupante malgré une qualité de soins remarquable.
Quelle est la particularité de l’établissement que vous allez piloter ?
Je vais diriger cet établissement de service privé d’intérêt collectif (Espic), Diaconesses Croix Saint-Simon, qui est l’un des plus gros établissements MCO de l’est parisien avec 360 lits et places, 1 200 salariés et 180 millions d’euros de budget. Il s’inscrit dans une histoire profondément humaniste, issue de la fusion des deux établissements.
Il s’agit d’un alliage unique avec une forte inscription de proximité dans un territoire exposé régulièrement à la précarité, au vieillissement de la population et dans un désert médical ! Il existe aussi un maillage très fort avec les CPTS. Et en même temps, notre établissement, avec son caractère d’excellence, figure dans le peloton de tête du classement du Point [42e du classement des hôpitaux place pour le traitement de 15 pathologies, NDLR].
“Nous avons amélioré la fluidité de nos parcours de prise en charge, le virage ambulatoire et nos durées moyennes de séjour
Comment comptez-vous poursuivre le redressement financier de l’hôpital ?
À la suite de l’affaissement général de l’offre de soins pendant le Covid, l’établissement n’était pas en grande forme financière. Depuis, nous avons réussi à remonter la pente collectivement, avec la communauté médico-soignante, pour 90 % du déficit qui a été ramené en 2024 à environ 3 millions d’euros. De fait, la situation était beaucoup plus préoccupante en 2022. Nous avons su mener à la fois une politique d’efficience avec une réduction des dépenses en contexte d’inflation, mais surtout avec une capacité additionnelle de croissance d’activité.
Pour y arriver, nous avons amélioré la fluidité de nos parcours de prise en charge, le virage ambulatoire et nos durées moyennes de séjour. Nos deux sites, pas encore totalement occupés, avec pour certains des locaux neufs sur 20 services, peuvent être encore plus opérationnels. Et nos perspectives d’ici à fin 2025 sont l’ouverture d’un centre de santé dans le XXe arrondissement, avec la fondation Adolphe de Rothschild, et d’un hôpital de jour de médecine. En parallèle, nous allons ouvrir une salle de bloc supplémentaire dans la bascule 2025/2026.
“Nous misons sur la qualité de vie au travail, des plateaux techniques modernes, des circuits courts de décision
Avez-vous des postes de médecins vacants ?
Nous n’avons pas de problème d’attractivité parmi les 200 médecins qui exercent chez nous. Mais des difficultés persistent sur des postes d’assistants partagés ou sur certains postes de Padhue [praticiens à diplôme hors UE]. C’est regrettable car les Espic représentent de très bons terrains de stage.
Pour autant, nous devons rester vigilants car nous sommes sans dépassements d’honoraires et donc concurrencés aussi par le secteur public qui a une activité libérale. Nous misons donc sur la qualité de vie au travail, des plateaux techniques modernes, des circuits courts de décision.
Notre hôpital appartient aux équipes médico-soignantes et il me précède dans son histoire. Je veux accentuer sa visibilité, son virage numérique et son pilotage par les données. En témoigne d’ici peu notre changement de dossier patient informatisé pour basculer avec Dedalus de son logiciel DxCare vers Care4U, qui est aussi l’orientation prise par l’AP-HP depuis juin 2024.
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