Après le temps des rapports (cinq depuis 2013 !), celui de l'action. « La psychiatrie ne sera plus le parent pauvre : j'en fais une priorité de santé », a déclaré Agnès Buzyn devant un parterre de psychiatres, vendredi 26 janvier.
La ministre n'a pas promis de hausse des moyens financiers. « Annoncer des moyens supplémentaires n'est pas toujours l'alpha et l'omega en matière de bonnes pratiques. C'est même parfois la solution de facilité », se défend-elle dans un entretien au « Monde ». Elle s'est dite en revanche « particulièrement vigilante à ce que le budget de la psychiatrie soit préservé dans les groupements hospitaliers de territoires (GHT) et les hôpitaux généraux ». L'allocation des ressources sera revue en fonction de nouveaux indicateurs de qualité, et une réflexion sera engagée pour faire évoluer le modèle de financement, en écho à la réforme nationale. Par ailleurs, la psychiatrie sera l'une des premières disciplines concernées par les financements de parcours innovants, prévus dans l'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale.
À plus long terme, la ministre envisage de développer la pédopsychiatrie de ville et les consultations complexes de psychiatrie en médecine générale, via leur inscription dans la prochaine révision conventionnelle (2021).
Formation et recherche
Pour panser les plaies d'une pédopsychiatrie sinistrée, Agnès Buzyn promeut l'enseignement et la recherche. Toutes les facultés auront au moins un PU-PH en pédopsychiatrie ; deux postes viennent d'être créés, portant l'effectif national à 41 emplois de PU-PH. Un appel à projet sera lancé pour 10 postes de chef de clinique assistant (CCA) en pédopsychiatrie. Une révision de la maquette de la formation des pédopsychiatres devrait être engagée, sous l'égide du Pr Benoît Schlemmer, président du comité de suivi de la réforme du 3e cycle.
Plus largement, Agnès Buzyn a rappelé que la psychiatrie est l'une des priorités du programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) 2018. Elle envisage d'installer une coordination nationale de la recherche en psychiatrie, afin d'harmoniser les travaux de recherche, d'apporter aide et ressources aux chercheurs, et d'imposer la France sur la scène internationale.
En matière de formation, tous les médecins généralistes auront un stage de psychiatrie durant leur formation, pour savoir repérer les pathologies psychiatriques, conduire un bilan initial, et orienter vers le spécialiste si besoin. Les infirmiers en pratiques avancées devraient pouvoir se spécialiser en psychiatrie d'ici la fin de l'année.
Bonnes pratiques et indicateurs
La Haute Autorité de santé doit produire des indicateurs de qualité des soins et de nouvelles recommandations de bonnes pratiques, relatives à la médication, la précocité des diagnostics, les délais de prise en charge, les taux de suicide. La réduction du recours à la contrainte et à l'isolement doit être un objectif à « atteindre collectivement, en interrogeant nos pratiques, en réformant nos formations », a déclaré Agnès Buzyn.
La ministre a encouragé les coopérations entre acteurs du soin somatique et du soin psychiatrique, les liens entre le médical, le médico-social et le social au sein des projets territoriaux de santé mentale (PTSM), et la sectorisation.
La prise en charge du patient psychotraumatisé (femmes, enfants, migrants, victimes d'attentat, etc) bénéficiera de la création de 10 unités en 2018, tandis qu'une formation spécifique transversale sur le sujet devrait s'inscrire dans le 3e cycle des études.
Un dernier volet de mesures concerne la prévention du suicide : le dispositif Vigilans de recontact du suicidant à sa sortie de l'hôpital, expérimenté dans 5 régions et un département, doit être généralisé dans les deux ans ; un numéro unique pour les personnes en situation de détresse psychique est à l'étude.
Enfin la ministre a indiqué qu'elle assurerait personnellement la présidence du comité stratégique de psychiatrie et de santé mentale, qui remplacera le conseil national de santé mentale installé en octobre 2016 par Marisol Touraine.
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