C’est l’exaspération et la colère pour Action praticiens hôpital (APH). Alors que les gardes ont bien été revalorisées de 50 % sous l’ère du ministre de la Santé François Braun, puis pérennisées par son successeur Aurélien Rousseau, les astreintes n’ont toujours pas fait l’objet d’une revalorisation dans les mêmes proportions, une demande de longue date des syndicats de praticiens hospitaliers.
120 millions d’euros
Et pourtant, cette requête est bien dans les tuyaux depuis un an, explique le Dr Yves Rébufat, délégué général d’APH : « François Braun avait bien compris à la fin de son mandat qu’il n’était plus possible de maintenir une différence de traitement entre gardes et astreintes. Il était prêt à faire un geste, mais il n’en a pas eu le temps. » Aurélien Rousseau qui a repris le flambeau a ensuite renoué le dialogue avec les organisations syndicales et a fait voter la revalorisation des astreintes dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024.
Mais six mois plus tard, les décrets d’application manquent à l’appel. APH rappelle que l’ensemble de la
permanence des soins (gardes et astreintes) « n’avait pas été revalorisé depuis plus de 15 ans alors que la charge d’activité pesant sur les praticiens de l’hôpital public, augmentait de manière exponentielle pendant cette même période pour des raisons sociétales mais aussi réglementaires ».
En conséquence de quoi, le syndicat réclame la « revalorisation immédiate de 50 % de l’ensemble des indemnités liées aux astreintes hospitalières avec effet rétroactif au 1er janvier 2024 comme cela a été fait pour les gardes ».
Le décompte du temps de travail en question
À l’hôpital public, le dispositif des astreintes existe sous deux formes.
Un forfait de base minimal d’environ 40 euros rémunère les praticiens hospitaliers (PH), qu’ils aient ou pas à se déplacer. Si le déplacement prend plus de trois heures consécutives, ou plus de cinq heures non consécutives, le PH est rémunéré comme une demi-garde, soit environ 300 euros brut. La seule obligation de l’employeur est alors de décompter le temps de déplacement effectif. Mais dans les faits, il peut être très compliqué pour les directions hospitalières d’effectuer ce décompte, le temps des PH se faisant en demi-journée. Selon le Dr Yves Rébufat, les établissements préféreraient budgéter les lignes d’astreinte à l’année.
Les hôpitaux se retournent donc vers un système moins contraignant, le forfait astreinte. Aucun temps de travail n’est décompté. Mais un plafond de 195 euros brut par mois est négocié pour les astreintes en relation avec un plateau technique (bloc opératoire, radiologie interventionnelle, cardiologie interventionnelle), les autres spécialités recevant 185 euros par mois. Ces montants, souvent moindres, sont négociés entre les directions des établissements et les commissions médicales d’établissement.
« Omerta »
Dans ce cas, si les hôpitaux ne décomptent pas le temps de travail, les 48 heures hebdomadaires réglementaires sont vite dépassées, ce qui fait basculer les PH dans le temps de travail additionnel. Or le temps de travail additionnel fixé par la réglementation non contractualisable est rémunéré en fonction des deux premiers échelons de la grille salariale, ce qui est moins valorisant pour le PH et dans la plupart du temps n’est pas décompté non plus. Dans la pratique, les plus gros établissements ayant beaucoup de lignes de garde et d’astreinte adoptent ce fonctionnement, soit environ la moitié des hôpitaux, selon APH. C’est pourquoi le Dr Rébufat et son syndicat dénoncent depuis des années une « omerta » sur le non-respect de la réglementation du temps de travail des médecins hospitaliers.
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