Alors que le service des urgences de l’hôpital de Mulhouse (Haut-Rhin), deuxième ville d’Alsace, est confronté depuis plusieurs mois à une pénurie dramatique de médecins, l’ancien maire de la ville, actuel président (LR) de la région Grand Est, a décidé de renfiler la blouse pour prêter main-forte à ses confrères.
Le Dr Jean Rottner a annoncé samedi, à la surprise générale, qu’il reprendrait provisoirement son activité médicale aux urgences, un service qu’il avait lui-même dirigé jusqu’en 2010. Dès octobre, le médecin devrait réintégrer à temps partiel le service d'accueil des urgences du groupement hospitalier régional Mulhouse Sud-Alsace (GHRMSA).
Éviter une fermeture temporaire
La situation locale est explosive. À la suite de plusieurs vagues de démissions, le service des urgences du GHRMSA, qui comptait 22 médecins équivalents temps plein (ETP) en juin dernier, pour un bassin de 450 000 habitants, n’en compte plus que huit aujourd’hui et va encore en perdre un en novembre !
La situation est tellement tendue que l’hôpital d’Altkirch a déjà dû fermer provisoirement ses urgences il y a deux semaines. Et l'hôpital de Mulhouse lui-même n’exclut pas de devoir recourir à une telle mesure temporaire, ce qui serait catastrophique pour cette ville de 270 000 habitants. Une suspension du SMUR est envisagée pour les mêmes raisons.
De plus, une vive polémique entre l’agence régionale de santé (ARS) et les médecins a alourdi le climat – le directeur de l’ARS accusant certains urgentistes démissionnaires d’être ensuite revenus faire des intérims à l’hôpital, ce qui constitue selon lui « un vrai racket », et menaçant désormais de les « blacklister ». Les praticiens concernés ont fort mal accueilli ces déclarations.
Effet d'entraînement
Le retour surprise du Dr Rottner, annoncé samedi par le GHRMSA, dont il est toujours le président du conseil de surveillance en tant que premier adjoint au maire, a été salué par l’ensemble du personnel de l’hôpital.
Soulignant que c’est l’hôpital de Mulhouse qui l’a formé et lui a « permis d’exercer ce métier passionnant », le Dr Rottner souhaite aujourd’hui l’aider à sortir de cette crise en venant donner « un coup de main » à l'équipe restante. Il précise qu’il occupera ces fonctions pendant trois mois, et qu’il consacrera « son temps libre et personnel à cette mission ». Le président de la région Grand Est souhaite rester à Mulhouse « jusqu’à la nomination d’un nouveau chef de service et s’effacera dès l’arrivée de ce dernier », confie-t-il.
Il précise également avoir obtenu l’aval de l’Ordre des médecins avant de s’engager dans cette mission et a « prévenu en amont la ministre de la Santé pour éviter toute ambiguïté ». Au-delà de son activité à Mulhouse, le Dr Rottner espère que sa décision « provoquera un effet d’entraînement » au profit du service.
Cette initiative intervient dans un contexte de crise nationale des urgences, qui vient de donner lieu à l'annonce d'un plan de refondation des urgences en douze mesures.
Cohérence
Jean Rottner a été élu maire de Mulhouse en 2010, date à laquelle il avait quitté ses fonctions hospitalières et médicales. En 2017, il avait été élu président de la région Grand Est, qui regroupe depuis 2015 les anciennes régions Alsace, Lorraine et Champagne-Ardenne.
Il s’est fortement investi dans le développement technologique et numérique de cette nouvelle région, dont il tente de renforcer la cohérence, alors même qu’un grand nombre d’élus alsaciens et, dans une moindre mesure mosellans, souhaitent son éclatement et le retour des trois anciennes régions qui la composent.
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