Changement de formulation, pas d'ambition : les étudiants de troisième cycle de médecine générale (et d'autres spécialités de premier recours) ne seront pas forcés d'effectuer leur dernière année d'internat en autonomie complète dans un désert médical mais ils devront faire un stage d'« au moins six mois en ambulatoire », « sous le régime de l'autonomie supervisée », et « en priorité dans les zones sous-denses ».
C'est cette rédaction intermédiaire qui a été retenue par la commission mixte paritaire (CMP, regroupant sept députés et sept sénateurs), permettant de trouver un accord sur cette délicate question de la professionnalisation territoriale en fin d'internat.
Agnès Buzyn a salué un « équilibre » sur le développement des stages d’internes en médecine de ville. « Loin des mesures coercitives, le texte oblige les facultés et agences régionales de santé à trouver des terrains de stages en priorité dans les territoires en tension », prévient la ministre. L'objectif est sauvé, salue le Sénat. Cette réforme permettra « de faire découvrir l’exercice ambulatoire à l’ensemble d’une promotion de médecine et aux territoires de disposer du renfort d’étudiants parvenus presque au terme de leur formation ».
Pas seuls dans la nature
Mais la formulation s'est adoucie. Début juin, les sénateurs avaient adopté contre l'avis du gouvernement un amendement transpartisan visant à obliger les internes de médecine générale (et d'autres spécialités à définir par décret) à effectuer leur dernière année en totale autonomie dans les zones fragiles. Le dispositif a donc été réduit à six mois et placé sous supervision. Ces stages débuteront dès le 1er novembre 2021.
L'idée initiale d'expédier les internes en autonomie dans les zones déficitaires pendant un an avait provoqué un tollé parmi étudiants (ANEMF), internes (ISNAR-IMG, ISNI) et jeunes médecins (ReAGJIR) mais aussi chez les syndicats installés et les enseignants (SNEMG). Pour beaucoup, une telle mesure aurait eu des conséquences délétères sur la formation et la qualité des soins prodigués dans ces territoires. La jeune génération avait appelé à se mobiliser via la campagne #pasencadrépasformé.
Le défi du recrutement des encadrants
Pour les carabins (ANEMF) et les internes (ISNAR-IMG, ISNI), les parlementaires n'ont pas été à la hauteur et le gouvernement « joue avec le feu ». Ils craignent que le manque de maîtres de stage (MSU) en médecine générale et l'absence d'encadrants dans les autres spécialités empêchent l'obtention de certains diplômes. Les juniors exhortent le gouvernement à se saisir de la question du recrutement des MSU. « Les agréments délivrés pour l'accueil des internes ne devront pas être dévoyés au profit des zones sous-denses, ça serait inacceptable, prévient Lucie Garcin, présidente de l'ISNAR-IMG. L'argument pédagogique doit l’emporter sur celui de la désertification ».
Pour les autres spécialités concernées par ce stage ambulatoire fléché en zone fragile (ophtalmologie, pédiatrie, dermatologie), la mesure passe mal. « En fin d'internat, la phase de consolidation dure un an, c'est très difficile d'envisager de changer les maquettes alors que la réforme du troisième cycle n'est pas terminée», explique Antoine Reydellet, président des internes de l'ISNI. Le bureau prévoit une assemblée générale extraordinaire aujourd'hui et n'exclut pas une mobilisation étudiante.
Egalement prudente, le Dr Laure Dominjon, présidente du Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants (ReAGJIR), juge que la nouvelle formule est « un moindre mal ». Le syndicat sera vigilant sur la qualité des offres de stages en zones sous-denses. « Il faudra que l'interne puisse découvrir l'exercice coordonné et éviter tout remplacement déguisé ».
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