« Il ne se passe pas une semaine sans qu’un soignant ne soit victime d’agression. On en a marre ! » C’est par ses mots que le Dr Saïd Ouichou, généraliste marseillais à l’origine du « Collectif du 12 mars 2025, santé en danger » avait alerté la semaine dernière sur une certaine « banalisation » des violences verbales et physiques contre les soignants, rapportées régulièrement par la presse locale.
La dernière affaire en date est racontée le 18 mars par La Charente libre : l’histoire d’un médecin généraliste de Saint-Genis-d’Hiersac (Charente) menacé de mort par son ancien patient. Le Dr Admed Benmoulai a été alerté par le médecin-conseil de la Sécu destinataire d’un message d’une violence inouïe. Dans ce mail, son ancien patient âgé d’une quarantaine d’années a menacé de « couper la tête » au médecin et de « l’apporter sur un plateau ». « Ce n’est pas l’envie qui me manque, écrit l’homme. Ne me poussez pas sinon vous aurez un médecin mort sur le bras ». Selon le médecin généraliste, les tensions entre les deux hommes ont débuté en 2024. Le praticien avait refusé de lui rédiger un courrier pour consulter un rhumatologue.
Mais le patient avait insisté et pris 67 rendez-vous au cabinet. Puis un soir, il avait bloqué la voiture du médecin dans une rue. Le Dr Benmoulai avait porté plainte à l’époque mais l’affaire avait été classée sans suite. À la suite de cette nouvelle menace, le médecin généraliste avait de nouveau porté plainte et décidé de fermer son cabinet durant deux semaines. « Je ne suis pas à l’aise pour travailler dans des conditions comme ça. Tant que je ne saurai pas ce qui se passe, je ne reprendrai pas », a confié le médecin à La Charente libre.
Trente-cinq points de suture sur le visage
Car parfois, les menaces sont mises à exécution. L’Union raconte dans son édition du 18 mars le passage à l’acte d’un patient à l’encontre de son médecin. L’accusé originaire de Saint Erme-Outre-et-Ramécourt (Aisne) est en cours de jugement aux assises de l’Aisne (Hauts-de-France) pour avoir percuté le généraliste avec sa voiture. L’homme avait depuis cinq moins préparé ce projet funeste parce qu’il avait la sensation que son médecin lui avait caché un cancer à l’estomac. « Je voulais le tuer parce qu’il me laissait mourir », a expliqué l’accusé aux juges. Le médecin de 77 ans s’en est sorti avec 35 points de suture sur le visage, plusieurs côtes et vertèbres cassées et de multiples contusions sur le corps.
Pour cette tentative d’assassinat, l’accusé, qui présente selon le quotidien local des « problèmes médicaux », encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Une décision de justice qui sera très attendue par la communauté soignante qui, depuis l’affaire Oulmekki, réclame davantage de sévérité dans les sanctions encourues pour violence.
Et si la fin des violences passait (aussi) par moins de certificats inutiles ?
Moins d’une semaine après la journée de mobilisation contre les violences faites aux soignants du 12 mars, les syndicats de médecins libéraux n’ont aucune intention de relâcher la pression. Conscientes que « le renforcement des sanctions encourues par les auteurs de violences ne résoudra pas à lui seul les difficultés », huit organisations syndicales soutenues par l’Ordre des médecins estiment ce mercredi 19 mars que « la lutte contre les violences sur les professionnels de santé passe d'abord par l'amélioration des conditions de prise en charge de la population ». Ce qui réclame de « réduire la pression sur le système de santé si on veut combattre les comportements très inquiétants ». Les libéraux souhaitent donc une meilleure régulation des demandes de certificats médicaux non obligatoires, « qui font perdre du temps médical, au détriment du portefeuille du patient et de l’Assurance Maladie, tout en mettant les médecins dans la situation délicate de refuser d'effectuer pour le compte du patient un certificat qui ne devrait même pas être demandé ».
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