Budget de la Sécu : la commission des affaires sociales du Sénat hostile à la coercition mais vigilante sur le coût de la prochaine convention

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Publié le 03/11/2022
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Crédit photo : Garo/Phanie

Après avoir passé le cap de la première lecture à l'Assemblée nationale lundi soir – après l'échec des motions de censure des oppositions – le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) a été examiné mercredi en commission des affaires sociales du Sénat qui a adopté une centaine d'amendements.

« Nous avons un peu modifié le texte, notamment sur des mesures touchant à l'organisation des soins qui ne nous semblent pas devoir figurer dans un PLFSS mais qui seront traitées dans la future proposition de loi de la députée Stéphanie Rist  [sur de nouveaux accès directs] », a expliqué jeudi Catherine Deroche, présidente (LR) de la commission. Des suppressions – de forme donc et non sur le fond – concernent à la fois des mesures votées sur le déploiement de la pratique avancée infirmière et sur le partage de la charge de la permanence de soins entre toutes les structures libérales et hospitalières et l'ensemble des professions médicales d'un territoire donné.   

« Nous nous sommes également beaucoup interrogés sur l'objectif national des dépenses d'assurance-maladie (Ondam), a ajouté la présidente. En effet, sa construction nous semble douteuse surtout quand le gouvernement annonce de nouvelles dépenses face à la désespérance des pédiatres d'abord de 150 millions puis hier de 400 millions d'euros ». Une enveloppe néanmoins validée mais avec une « clause de revoyure » car les taux envisagés « ne semblent pas suffire à absorber des besoins de santé en forte hausse dans un contexte inflationniste », dit la commission.

Mathématique 

De surcroît, la commission sénatoriale se montre préoccupée par le coût de la prochaine convention médicale dont les négociations vont démarrer mercredi prochain entre la Cnam et les syndicats de médecins libéraux. Ainsi, un amendement prévoit que de nouvelles mesures conventionnelles dépensières devraient être approuvées a posteriori via… une loi de financement de la Sécurité sociale rectificative. Une disposition qui viendrait, en revanche, remplacer le délai de six mois avant l'entrée en vigueur de mesures financières (stabilisateurs automatiques) que le gouvernement a déjà prévu de supprimer partiellement pour les aides à l'embauche d'un assistant médical ou la majoration pour les soins non programmés de 15 euros.

En revanche, même si ce n'est pas la religion majoritaire du Sénat, la commission – probablement influencée par sa présidente médecin de formation – s'oppose à la régulation pour lutter contre les déserts médicaux. « Je suis hostile à l'idée de gérer la pénurie par la coercition, a martelé la sénatrice LR de Maine-et-Loire. Cela n'a d'ailleurs jamais marché nulle part », en référence aux travaux de l'économiste de la santé Dominique Polton. « Je ne suis pas médecin et je suis contre la coercition, a abondé sa collègue, la sénatrice centriste de Mayenne, Élisabeth Doineau. C'est mathématique, on ne peut pas partager une ressource que l'on n’a pas. »

Quatrième année d'internat et intérim au menu

La question de la quatrième année d'internat de médecine générale en priorité en zone sous-dense semble être, en coulisses, un peu moins consensuelle au sein de la commission. Néanmoins, celle-ci a supprimé l'article en question du PLFSS pour le remplacer par un nouveau qui reprend la proposition de loi Retailleau, adoptée en octobre au Sénat, ouvrant la possibilité du paiement à l'acte pour ces internes de quatrième année.

Une manière aussi, selon Catherine Deroche, de « rendre recevable » dans le PLFSS une mesure qui, dans sa rédaction initiale, risquerait d'être censurée par le Conseil constitutionnel car non strictement budgétaire. « Quand nous avions reçu les internes, ils nous avaient dit ne pas être hostiles à cette 4e année mais pas à n'importe quelle condition », a rappelé la sénatrice LR.

S'agissant de l'hôpital, la commission pousse à un tour de vis supplémentaire sur les dérives de l'intérim. Un amendement prévoit que l'intérim ne soit ouvert, dans le cadre de contrats de mise à disposition, « qu'à des professionnels ayant exercé récemment dans le cadre de contrats classiques, même à durée déterminée ». Un autre invite à ce que les agences régionales de santé (ARS) puissent davantage mettre leur nez dans le recours à l'intérim par les hôpitaux.

Taxe sur les complémentaires

Sur le volet recettes, la commission a rétabli la version initiale du gouvernement sur la réforme de la fiscalité du tabac « plus ambitieuse » et a ajouté une contribution sur les complémentaires santé (AMC) de 300 millions d'euros. Elle souhaite par ailleurs, à l'instar de certains députés dont Thomas Mesnier, que les AMC prennent en charge les futures consultations de prévention, comme n'importe quelle consultation, en tout cas pour celles prévues aux âges de 45 et 65 ans.

Le PLFSS sera examiné en séance publique au Sénat à partir de lundi prochain.


Source : lequotidiendumedecin.fr