LE DÉBAT SUR L’AVENIR DE LA LIBERTÉ D’INSTALLATION (re)prend une ampleur considérable. S’il occupe logiquement l’espace des négociations conventionnelles (les partenaires sont chargés de trouver des solutions opérationnelles pour lutter contre la désertification, une réunion s’est tenue hier sur ce thème), il semble aussi passionner les élus et les responsables politiques, à un an de l’élection présidentielle.
En témoignent les passes d’armes à l’Assemblée nationale dans le cadre de la loi Fourcade, mais aussi les hésitations du PS sur le sujet, divisé entre les « durs » qui veulent en finir avec la liberté d’installation et ceux qui hésitent à s’attaquer à ce pilier de l’exercice libéral et à braquer la jeunesse.
Positions conservatrices.
Lors de l’examen de loi Fourcade, la députée UMP Valérie Boyer, rapporteure du texte, a accusé certains parlementaires de vouloir « revenir sur des principes fondamentaux de l’exercice de la médecine dans notre pays – la liberté d’installation puis, pourquoi pas, la liberté de prescription ». Face aux avocats des mesures autoritaires, elle a égrené les mesures de la loi Fourcade destinées, admet-elle, à rétablir la confiance : « suppression du volet coercitif du contrat de santé-solidarité, rappel de la liberté d’installation des médecins, incitation à l’exercice en commun avec la création d’un nouveau type de société, la société interprofessionnelle de soins ambulatoires [SISA]… ».
En riposte, le député socialiste Christian Paul, principal orateur de l’opposition, a dressé un long réquisitoire, dénonçant le « manque de courage initial [la loi HPST ] face à l’ampleur du risque de voir des pans entiers du territoire français sombrer dans le désert médical » et aujourd’hui « l’impuissance » d’une nouvelle loi « qui relaye les positions les plus conservatrices ». Pour cet élu socialiste, « la situation dans les territoires, fortement liée à l’âge des médecins, devient catastrophique », faute de traitement à la hauteur. Les aides financières ? Elles montrent leurs limites. Le desserrement du numerus clausus ? Son impact est jugé insuffisant. « Sans doute faudrait-il davantage le régionaliser, car ce n’est pas le nombre de médecins qui est en cause mais leur répartition sur le territoire », fait valoir Christian Paul qui conclut sur le mode accusateur : « le désert médical a un bel avenir. Cette proposition de loi est la dernière halte avant d’y pénétrer ».
Autriche, Allemagne, Québec..
Dès lors, faut-il, oui ou non, en finir avec la liberté d’installation ? Certains élus de gauche plaident pour des « restrictions » fortes, jugeant que le sujet n’est pas tabou. « Avec des fortunes diverses et des systèmes de santé différents, c’est vrai, l’Allemagne, l’Autriche, la Grande-Bretagne mais aussi la Suisse ou le Québec ont choisi de limiter la liberté d’installation », explique un député PS. En Allemagne comme en Autriche, une commission délivre des autorisations d’installation avec des quotas par territoires de santé (le résultat s’est révélé contre-productif). Au Québec, les installations doivent être conformes au schéma de l’agence régionale qui planifie l’offre de soins. Et la Suisse, rappelle-t-on au PS, « plafonne ou gèle les installations de généralistes ou de spécialistes pour chaque canton ».
Xavier Bertrand, qui se pose désormais en champion de la « logique incitative », conformément aux instructions présidentielles de cette fin de mandat, n’a pas manqué de tacler ses adversaires socialistes dans l’hémicycle. « Je comprends bien qu’en définitive il s’agisse, pour les uns et les autres, de se positionner. Pas par rapport aux médecins, pas par rapport aux patients, mais par rapport à votre formation politique : celui qui cognera le plus fort aura le plus de légitimité pour aborder ensuite les questions de santé au sein du PS ». La liberté d’installation, invité surprise de la précampagne présidentielle?
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