C'est une décision qu'il espère depuis 2018, et que les diverses instances juridiques rechignaient à prendre. La cour d'appel de Bordeaux a ordonné le transfert de Romain Dupuy, auteur du meurtre de deux soignantes à Pau en 2004, vers un hôpital psychiatrique classique. Déclaré irresponsable pénalement en raison de sa schizophrénie, il était depuis 2005 placé en hospitalisation complète sans consentement, à l'unité pour malade difficile (UMD) du centre hospitalier de Cadillac (Gironde).
Cette décision du 15 septembre, révélée par le journal Libération et que l'AFP a pu consulter, ordonne « la levée de la mesure de placement en unité pour malades difficiles (UMD) » de Romain Dupuy, 39 ans. Il sera désormais pris en charge dans un service général de psychiatrie « sous le régime de l'hospitalisation complète », précise la cour.
État stable, curatelle levée
Déclaré pénalement irresponsable en 2007 en raison d'un trouble psychotique chronique de nature schizophrénique, Romain Dupuy avait bénéficié d'un non-lieu* et donc n'avait pas été jugé pour les meurtres à l'arme blanche d'une aide-soignante et d'une infirmière, au centre hospitalier psychiatrique de Pau dans la nuit du 17 au 18 décembre 2004.
D'après les derniers examens des médecins effectués en 2022, évoqués dans l'ordonnance de la cour d'appel, l'état mental de Romain Dupuy est « stable ». La mesure de curatelle dont il faisait l'objet a été récemment levée, relèvent en outre les magistrats.
Le patient avait fait l'objet de quatre rapports favorables d'une commission de suivi médical depuis 2018. Mais en dépit de plusieurs demandes de transfert vers un hôpital psychiatrique classique, il était resté à l'UMD de Cadillac. La préfecture de Gironde s'était opposée en 2022 à une décision favorable du juge des libertés et de la détention (JLD), qui considérait que le placement en UMD était « devenu irrégulier ». La Cour d'appel, saisie par le parquet de Bordeaux et la préfecture de Gironde, avait alors considéré que le JLD n'était pas compétent pour ordonner une mainlevée.
Quel juge est compétent ?
Rebondissement le 4 avril dernier : le tribunal administratif de Bordeaux avait refusé de statuer sur le dossier, renvoyant au tribunal des conflits le soin de déterminer qui, du juge judiciaire ou du juge administratif, était compétent en la matière. Le 3 juillet, l'instance avait tranché en faveur du premier, estimant que « toute action relative à la régularité et au bien-fondé d'une mesure d'admission en soins psychiatriques sans consentement prononcée sous la forme d'une hospitalisation complète et aux conséquences qui peuvent en résulter ressortit à la compétence de la juridiction judiciaire ». D'où ce retour de l'affaire à la Cour d'appel de Bordeaux, déclarée compétente pour le litige opposant Romain Dupuy à la préfecture de Gironde.
Le parquet général étudie encore la possibilité de faire un pourvoi en cassation, a néanmoins indiqué le ministère public à l'AFP. Si tel n'est pas le cas, le préfet doit prononcer par arrêté la sortie du patient de l'UMD, puis l'ARS doit organiser son transfert vers un autre hôpital.
*Pour rappel, le régime d'irresponsabilité a été réformé en 2021. La loi prévoit notamment qu'en cas de divergences entre experts psychiatres, la question de la responsabilité ou de l'irresponsabilité pénale soit jugée par les juridictions compétentes (tribunal correctionnel, pour un délit, cour d'assises, pour un crime), à huis clos, avant le jugement de l'affaire le cas échéant (si l'auteur est reconnu responsable).
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