Il s’agit d’un texte attendu par les professionnels de santé, dans le but de renforcer leur sécurité. La proposition de loi Horizons – portée par l’ex-député des Alpes-Maritimes Philippe Pradal –, adoptée à l’unanimité et amendée à la marge par l’Assemblée le 14 mars 2024, entend durcir la réponse pénale face aux violences perpétrées à l’encontre des soignants. L’objectif affiché par le gouvernement ? « Tolérance zéro » pour les agresseurs.
Mais la dissolution de juin 2024 a stoppé net le calendrier parlementaire. S’en est suivi un flou quant à l’avenir du texte, jusqu’à ce que le Sénat reprenne la main et que le gouvernement, une fois stabilisé, engage une procédure accélérée sur ce texte, examiné en séance publique au Sénat à partir de ce mardi 6 mai 2025.
Faciliter les plaintes
Parmi les principales mesures du texte s’inspirant du plan de 42 mesures présenté par l’ancienne ministre de la Santé Agnès Firmin Le Bodo : les directeurs d’hôpitaux pourront déposer plainte à la place de la victime – avec leur consentement écrit – en cas de menaces ou violences à l'encontre de leurs agents. Pour les libéraux, il en serait de même, s’ils n’ont pas d’employeur, par le biais d’une institution représentative – Ordre, syndicat ou URPS – qui porterait plainte à leur place. Quant aux soignants qui n’osent pas porter plainte par peur des représailles (mais qui veulent le faire en leur nom propre), ils pourraient déclarer comme domicile l’adresse de l’Ordre au tableau duquel ils sont inscrits ou du commissariat local.
Autre mesure : une disposition pour aggraver la sanction en cas de violences commises à l’encontre d’un professionnel de santé « ou un membre du personnel d’un établissement de santé, d’un centre de santé, d’une maison de santé, d’une maison de naissance, d’un cabinet d’exercice libéral d’une profession de santé, d’une officine de pharmacie, d’un laboratoire de biologie médicale ou d’un établissement ou service social ou médico-social ».
En outre, le texte introduit un « délit d’outrage » spécifique, étendu à tous les professionnels de santé, lequel permet, en plus, d’aggraver les peines pour violences ou vols et d’accélérer le traitement des poursuites par le délégué du procureur de la République, sur le principe du régime de protection pénale des agents du service public. Le texte prévoit l’application de toutes ces dispositions aux collectivités d’outre-mer.
Les soignants attendent des actes
Ce texte et ces mesures pour renforcer la sécurité des soignants bénéficient du soutien des Ordres nationaux des médecins, infirmiers, sages-femmes, pédicures-podologues, chirurgiens-dentistes, masseurs-kinésithérapeutes. Le 12 mars, une journée de mobilisation nationale des soignants, soutenue par les organisations professionnelles, a mis en lumière l’insécurité grandissante, autant en cabinets qu’en établissements.
Selon les chiffres de l’Observatoire national de la sécurité des médecins (ONSM), les incidents et violence à l’endroit des professionnels ont augmenté de 27 % en 2023 par rapport à 2022, le plus haut chiffre jamais enregistré, avec 1 581 fichiers de déclaration recensés. Les médecins généralistes sont les plus visés avec 64 % des cas d’agression, tandis qu’ils ne constituent que 43 % des effectifs. Autre fait significatif : la majorité des praticiens n’a pas porté plainte en 2023 (62 %). Seuls 31 % l’ont fait et 7 % ont déposé une main courante…
Référents de sécurité dans les ARS
Fin 2024, la violente agression du Dr Mohamed Oulmekki, généraliste de Drancy (Seine-Saint-Denis), a marqué l’opinion publique, qui a largement relayé sur les réseaux sociaux son visage tuméfié par les coups d’un patient agresseur. La condamnation à trois semaines de travaux d’intérêt général pour ce dernier avait énormément choqué. D’autres exemples de ces violences contre les soignants, souvent en ville, mais aussi à l’hôpital, ont défrayé la chronique ces derniers mois.
Dans la foulée du mouvement du 12 mars, le ministère avait répliqué en promettant une poignée de mesures : l’accompagnement de l’État autour des formations des soignants pour lutter contre la cyberviolence ; la sécurisation de l’exercice en ville par un soutien aux collectivités territoriales dans le déploiement de dispositifs de protection ; et un meilleur encadrement de la prise en charge de patients souffrant de troubles psychiatriques.
« Chaque acte de violence doit être signalé et chaque signalement doit déboucher sur une action », avait-on réaffirmé avenue de Ségur. La création d’un réseau national des « référents de sécurité » au sein des agences régionales de santé (ARS), avait aussi été annoncée. En somme, des mesures complémentaires au texte actuellement à l’étude au Sénat.
En visite à l’AP-HP, le ministre de la Fonction publique entend « protéger » les soignants
En déplacement mardi 6 mai au siège de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, où il a rencontré le directeur général Nicolas Revel, le ministre de la Fonction publique Laurent Marcangeli a salué le « courage », et « l’engagement [qui] force [l’]admiration » des agents hospitaliers, « cibles de violences, d’attaques, parfois même d’agressions dans l’exercice de leurs missions ». « Notre responsabilité est de les protéger », a indiqué le ministre. En 2022, 23 500 agents hospitaliers ont subi des actes de violence verbale et physique, soit 65 actes de violences par jour, a déploré Laurent Marcangeli, qui soutient « fermement » la PPL Pradal. Le ministre a enfin indiqué qu’il proposera « prochainement » au Premier ministre François Bayrou « l’inscription d’un projet de loi court, à la rentrée parlementaire, devant permettre de renforcer la protection fonctionnelle des agents ».
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