La Caisse primaire d'assurance-maladie (Cpam) du Bas-Rhin comparaissait ce 12 mars devant le tribunal judiciaire de Strasbourg après la plainte d'un homme trans pour la non prise en charge de soins liés à sa transition de genre.
« On est sur une question sociétale, a expliqué son avocate Laura Gandonou lors d'une audience au tribunal judiciaire de Strasbourg. L’Assurance-maladie doit-elle ou non prendre en charge des soins liés à une transition de genre ? »
L'avocate a fait valoir que le parcours de soins devait être le même pour les personnes transgenres que pour les cisgenres mais que les Cpam « créent des conditions surabondantes » pour obtenir le remboursement de soins liés à la transition de genre.
Son client, né femme et qui ne souhaite pas que son identité soit rendue publique, a débuté sa transition en 2017, d'abord une transition sociale, en l'annonçant à ses proches, puis une transition administrative avec un changement d'état civil, et une transition médicale, avec la prise d'un traitement hormonal en juin 2022.
En raison de sa dysphorie de genre, il a déposé une demande d'affection longue durée (ALD) afin de bénéficier d'une prise en charge totale de soins, notamment chirurgicaux pour mastectomie. Mais il s'est vu opposer un refus partiel.
Le jeune homme a saisi la commission de recours amiable en novembre 2022, qui a refusé sa demande en janvier 2023. Il s'est alors tourné vers la voie judiciaire. « Ce dossier met en lumière un dispositif qui ne fonctionne pas », a fait valoir son avocate, jugeant le refus de la Cpam du Bas-Rhin « abusif et mal fondé ». La représentante de la Cpam a de son côté expliqué que la décision de la caisse se basait sur un « avis médical ».
En France, les parcours de transition (hormonothérapie et chirurgie d’affirmation de genre) sont globalement financés par l’Assurance-maladie en cas d’accès à l’ALD. Mais aucun panier de soins de référence n’est défini. « Les remboursements de soins qui peuvent être essentiels pour le bien-être et la vie sociale de nombreuses personnes trans (…) ne se font pas de manière automatique mais se fondent sur l’avis du médecin-conseil de la sécu, avec des réponses très variables », avait expliqué au Quotidien Arnaud Alessandrin, sociologue spécialiste des LGBT.
Des recours similaires ailleurs en France
« On évolue lentement », a reconnu la représentante de la Cpam, conseillant au jeune homme de retourner voir son médecin et de recommencer un protocole de soins.
Cette transition de genre, « c'est un parcours qui prend des années », a témoigné le plaignant. « Ma vie, elle avance mais sur certaines choses je continue à faire du sur-place », a-t-il regretté, réclamant 10 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.
La décision sera rendue le 14 mai. Son avocate a expliqué défendre huit recours similaires un peu partout en France, dont deux qu'elle a plaidés à Bobigny (Seine-Saint-Denis) ce 10 mars. D'autres doivent se tenir à Lyon, Toulouse et Cahors, ou encore Grenoble.
La Haute Autorité de santé élabore des recommandations de parcours de transition des personnes transgenres. Ces travaux ont été entachés à plusieurs reprises par des attaques contre le groupe de travail, dont la divulgation dans la presse d’un document interne confidentiel. L’autorité de santé avait réagi dans une mise au point en dénonçant une instrumentalisation « à des fins polémiques au détriment des personnes concernées ». La publication est prévue fin du premier semestre 2025.
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