Comment gérer au mieux la désescalade thérapeutique chez les patientes atteintes d’un cancer du sein ? Cette question occupe désormais une place croissante dans les congrès de cancérologie, à l’initiative de cliniciens qui se demandent comment délivrer des traitements moins lourds mais tout aussi efficaces. Mais le débat est sensible, car il intervient dans un contexte de polémique autour du surdiagnostic dans le dépistage du cancer du sein. « Il existe, c’est vrai, un surdiagnostic dans environ 10 % des cas. Mais cela ne doit absolument pas remettre en cause l’utilité du dépistage précoce. C’est à celui-ci et à l’amélioration des traitements que nous devons la baisse de la mortalité par cancer du sein depuis les années 1990-2000 », indique le Dr Bruno Cutuli, vice-président de la Société Française de Sénologie et de pathologies mammaires (SFSPM) et coordinateur des recommandations sur le cancer du sein de l’InCA.
S’il peut être légitime d’envisager une désescalade pour certaines patientes, le Dr Cutuli estime que la priorité est d’abord de ne pas sous-traiter. « Beaucoup de personnes qui s’expriment sur le dépistage ne sont pas de cliniciens et n’ont jamais eu à prendre en charge des récidives de cancers du sein. Et ils doivent savoir que sous-traiter au début de la maladie peut avoir des conséquences très graves à long terme », souligne-t-il.
Dans 80 % des cas, les patientes atteintes d’un cancer du sein vont bénéficier d’un traitement par chirurgie et par radiothérapie. « L’irradiation au stade précoce reste un élément essentiel du traitement. Cela a un impact majeur sur le contrôle local, mais également sur la survie. Dans les cancers in situ, cette irradiation réduit de 50 à 60 % les taux de récidive locale après chirurgie conservatrice, tant in situ qu’invasive. Cela a été confirmé par quatre essais randomisés et une méta-analyse », indique le Dr Cutuli.
Pour les cancers du sein infiltrants, la radiologie réduit également de 65 à 75 % les taux de récidive locale après une chirurgie conservatrice. « La surimpression (boost) permet une réduction supplémentaire des récidives. L’irradiation est efficace pour toutes les catégories d’âge, mais des schémas hypofractionnés sont particulièrement adaptés aux femmes âgées », souligne le Dr Cutuli. Cela repose sur une réduction de la durée de traitement via une concentration des doses d’irradiation : 3 semaines au lieu de 5-6, pour la même dose délivrée. Validé au Canada et en Grande-Bretagne, ce schéma est aujourd’hui applicable en France.
En revanche, selon lui, les techniques d’irradiation partielle sont très hétérogènes et manquent encore de recul. « Elles ne doivent être utilisées que chez des patientes à très faible risque de récidive locale dans le cadre d’études contrôlées. L’irradiation locorégionale (ganglionnaire) pour les patientes à risque (en particulier avec envahissement axillaire) reste indispensable pour réduire le risque de rechute et augmenter la survie, comme l’ont confirmé plusieurs méta-analyses. Quatre études ont montré un bénéfice en survie (de 2-3 %) grâce à l’irradiation de la chaîne mammaire interne chez des patientes à haut risque de rechute. Par ailleurs, l’irradiation axillaire semble être une alternative tout à fait valable au curage axillaire en cas d’envahissement du ganglion sentinelle », indique le Dr Cutuli.
D’après un entretien avec le Dr Bruno Cutuli (Institut du Cancer Courlancy, Reims), vice-président de la Société Française de Sénologie et de Pathologie Mammaire (SFSPM)
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