Homme ou femme, l’AVC ne connaît pas de frontières. Pourtant, le genre joue un rôle important lorsqu’il s’agit d’évaluer les résultats de la prise en charge. « Malgré les améliorations au cours de la dernière décennie dans la prévention des AVC et leur prise en charge, des différences spécifiques au sexe subsistent en termes d'incidence, de facteurs de risque et de mortalité », a souligné la Dr Dearbhla Kelly (Boston), lors de la présentation d’une étude allemande (1). Pendant six ans (2014-2019), 1 882 930 événements d'AVC ont été recensés, dont 51,9 % (n = 905 667) sont survenus chez des hommes. Les femmes atteintes étaient plus âgées (âge médian 79 ans ; p < 0,001) et avaient, en général, davantage de comorbidités vasculaires que les hommes (p < 0,001) : hypertension artérielle (77 % contre 74,7 %), fibrillation atriale (33,3 % contre 25,6 %) et insuffisance cardiaque (12,3 % contre 9,7 %). Concernant le traitement, les hommes et les femmes ont eu un taux similaire de thrombolyse (13 % versus 12,9 % ; p = 0,002) ou de thrombectomie mécanique (0,1 % versus 0,1 % ; p < 0,001). Malgré cela, le nombre de décès à l'hôpital a été plus élevé chez les femmes que chez les hommes : 8,1 % contre 5,5 % (p < 0,001). Même après ajustement, le sexe féminin reste un facteur de risque indépendant de mortalité hospitalière par AVC ischémiques (OR = 1,12 [1,11-1,14] ; p < 0,001) et hémorragiques (OR = 1,19 [1,16-1,21] ; p < 0,001).
Un surrisque de décès
Ces données confirment les résultats de l’International Stroke Outcomes Study (INSTRUCT Study). Ceux-ci ont révélé que, par rapport aux hommes, les femmes ont un risque accru de 35 % de décéder et de 32 % d’avoir un mauvais résultat fonctionnel jusqu’à cinq ans après un AVC (2). D’après le Dr Hoang Phan (Australie), « ce qui sous-tend ces différences entre les sexes n’est pas entièrement compris ». Mais ceci pourrait s’expliquer par un âge plus avancé des femmes au moment de l’AVC, une limitation fonctionnelle plus importante auparavant, et une plus grande sévérité de l’évènement que chez les hommes. L’existence d’une fibrillation atriale et une prescription moins fréquente d’aspirine pourraient aussi jouer un rôle. « Il y a un dernier facteur péjoratif : la survenue d’une dépression post-AVC », a souligné le Dr Phan. En effet, les femmes ont significativement plus de risque de développer des symptômes dépressifs que les hommes, même après avoir pris en compte l’âge, la gravité de l’AVC, les limitations d’activité, les facteurs sociaux et les aspects cognitifs. Ces résultats soulignent l’importance d’une meilleure prise en charge thérapeutique et d’une réadaptation post-AVC optimisée, en ciblant particulièrement les patientes ayant moins de capacité de récupération (limitations fonctionnelles avant l’AVC, troubles de l’humeur, AVC sévère).
Des raisons d’espérer
Les résultats de l’étude allemande permettent cependant d’être optimiste car ils montrent une tendance récente favorable. En effet, les taux d’hospitalisation des femmes passent, pour les AVC ischémiques, de 155,3 pour 100 000 personnes en 2014 à 151,5 en 2019 (1). Cette légère tendance à la baisse est retrouvée également pour les AVC hémorragiques. « À l’origine de ces résultats, un meilleur contrôle des facteurs de risque chez les femmes, des recommandations de qualité à la disposition des praticiens et la mise en place plus proactive de cliniques de prévention des AVC », conclut la Dr Kelly.
(1) Kelly DM et al, abstract LB14
(2) Phan HT et al. Circ Cardiovasc Qual Outcomes, 2017 Feb;10(2):e003436.
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