La question de la durabilité des systèmes alimentaires est au programme des travaux des Nations unies depuis plusieurs années. Ce qui se retrouve dans le premier des huit objectifs du millénaire pour le développement (OMD) : « Éliminer l’extrême pauvreté et la faim. » Un objectif qui ne peut être travaillé sans questionner les systèmes alimentaires, les modes de production, leur effet sur l’environnement et la biodiversité. Selon l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), « un système alimentaire durable est un système qui assure la sécurité alimentaire et la nutrition pour tous, de manière à ne pas compromettre les bases économiques, sociales et environnementales nécessaires pour assurer la sécurité alimentaire et la nutrition des générations futures. »
« Les systèmes actuels ne sont pas durables et c’est pour cela que nous devons absolument développer les transitions vers l’agroécologie, avec l’agriculture bio en fer de lance », soutient Denis Lairon, docteur es-sciences, nutritionniste et directeur de recherche émérite à l’Inserm, qui collabore à l’un des programmes des Nations unies sur les systèmes alimentaires durables. Pourquoi la bio ? « Cela ne signifie pas que les autres initiatives (agriculture raisonnée, de conservation des sols, etc.) sont obsolètes, mais la bio doit être notre ambition, notre cap. Nous disposons pour cette agriculture d’un cahier des charges très précis, même s’il est encore améliorable. Parce qu’elle interdit l’utilisation des OGM et des pesticides de synthèse, l’agriculture bio est celle qui permet de nuire le moins possible à la biodiversité. »
Augmenter la part du bio
Réfléchir aux systèmes alimentaires suppose aussi de s’interroger sur la qualité nutritionnelle des aliments, et sur la possibilité de nourrir toute la planète ! Pour Denis Lairon, également auteur de l’ouvrage Manger sain et durable (1), la question de la part du végétal dans l’alimentation mérite d’être posée. « Une grande partie des acteurs s’accorde sur le fait qu’il faut aujourd’hui limiter la part de protéines animales et augmenter celle des aliments végétaux dans nos régimes alimentaires, détaille-t-il. Mais encore faut-il que cela aille de pair avec un fort développement du bio, car les végétaux sont aujourd’hui les aliments qui sont les plus contaminés par des résidus de pesticides ! On ne peut donc pas promouvoir une alimentation végétale sans augmenter la part du bio. Cela serait contre-productif. »
Denis Lairon reconnaît que certaines dynamiques peuvent se confronter voire s’opposer, que changer les pratiques prend du temps. « Cependant, les choses bougent ! Il y a dix ans on ne parlait pas de flexitariens, or on propose désormais des repas végétariens dans les cantines et on assiste aussi au verdissement de la politique agricole commune [PAC]. » Il rappelle enfin la nécessité de garder en mémoire le concept de « One Health », qui consiste à penser la santé à l’interface entre celle des animaux, des humains et de leur environnement, à l’échelle locale, nationale et mondiale. « Cette manière d’aborder la santé, dans le contexte mondial actuel, permet d’avoir une vision intégrée, et de trouver des solutions qui répondent aux enjeux à la fois de santé humaine et environnementale », conclut-il.
Exergue : « On ne peut pas promouvoir une alimentation végétale sans augmenter la part du bio »
(1) Lairon D. Manger sain et durable, de notre assiette à la planète. Éd Quæ, 2020. 18 €, 152 p.
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