LE QUOTIDIEN – A la veille d’une négociation décisive sur le secteur optionnel, croyez-vous, cette fois, à un accord ? Avez-vous la volonté d’aboutir ?
LE QUOTIDIEN – Cette négociation est conclusive. L’UNOCAM, qui représente ici les trois familles de complémentaires santé, a la volonté d’aboutir. J’y crois parce que les paramètres objectifs me paraissent être aujourd’hui réunis.
Dans le secteur optionnel, les médecins s’engageraient à réaliser au moins 30 % de leurs actes aux tarifs opposables et, sur le reste, à limiter les dépassements à 50 % par acte. Cela vous convient-il ? Les complémentaires assumeront-elles la prise en charge de ces compléments d’honoraires ?
Les paramètres financiers du secteur optionnel sont actés. L’UNOCAM s’engagera à recommander à ses membres la prise en charge des compléments d’honoraires plafonnés à 50 % par acte, sur le périmètre défini, corrélés à des engagements professionnels tangibles. Nous sommes au point d’arrivée. Les complémentaires santé, à l’unanimité, ne veulent plus de dépassements arbitraires, à l’initiative du praticien, sans corrélation avec des engagements précis de qualité et de transparence. Le médecin qui affirme « je vaux tant », on ne suivra plus !
Mais la signature de l’UNOCAM n’engagera pas formellement les mutuelles et les assurances qui veulent conserver la liberté d’inclure le secteur optionnel dans leurs garanties. Comment les convaincre de solvabiliser le secteur optionnel ?
D’abord, je remarque que la signature des syndicats de médecins… n’engagent pas formellement tous les médecins ! Il y aura deux cas de figure: les contrats complémentaires individuels et les contrats collectifs. Dans le premier cas, dès lors que la FNMF (Mutualité française) et la FFSA (assureurs privés) seront engagés par une signature nationale, on peut penser que le plus gros de leurs troupes suivront. Le secteur optionnel sera inscrit dans le libellé des contrats ou des garanties statutaires pour les assurances. Ensuite, il y a le cas des contrats collectifs. Même si les organismes ont la conviction de l’utilité du secteur optionnel, il faudra négocier avec les entreprises signataires des contrats.
Je veux préciser une autre chose : le secteur optionnel devra s’accompagner aussi d’une augmentation régulière des tarifs opposables remboursés par l’assurance-maladie. Cela veut dire qu’il faut rouvrir rapidement les travaux sur la CCAM technique [classification commune des acte médicaux], et même dès l’ouverture du secteur optionnel. Ce n’est pas le secteur optionnel qui doit remplacer l’évolution de la grille tarifaire des chirurgiens et piloter la politique de revenus des médecins.
Le secteur optionnel sera ouvert en priorité aux plateaux techniques lourds. Acceptez-vous le principe d’une évaluation avant extension éventuelle aux autres spécialités ?
Au départ, pour nous, le secteur optionnel ne concernait que les spécialistes de plateaux techniques du secteur II. Nos sommes prêts à accepter, puisqu’il faut aboutir, que soient concernés aussi, toujours pour les plateaux techniques, les praticiens de secteur I qui ont les titres requis [anciens chefs de clinique-assistants bloqués en secteur I, NDLR]. Ce n’était pas notre volonté initiale car l’idée n’est pas de diminuer le nombre de praticiens à tarifs opposables mais à honoraires libres. Aujourd’hui, nous proposons de fixer des objectifs en volume de montée en charge du secteur optionnel, en clair un pourcentage minimum de praticiens de secteur II optant pour le secteur optionnel. Faisons le bilan : si on constate, au bout de deux ou trois ans, mais pas cinq ans, que le secteur optionnel a vidé le secteur à tarifs opposables, il faudra arrêter les frais ! Mais si on ramène beaucoup de médecins du secteur II, on pourra discuter d’une ouverture élargie à d’autres spécialités…
Quelles contreparties qualitatives demanderez-vous aux médecins ?
Ce pilier de l’accord est crucial. Jusque-là, rien n’a été rédigé. Les syndicats de médecins devaient avoir l’initiative mais rien ne s’est passé. Demain, nous ferons une proposition qui mentionnera les engagements des professionnels. Depuis le début, l’UNOCAM explique que les médecins doivent rendre visible et tangible le respect de procédures et d’indicateurs définis par la Haute Autorité et les collèges de pairs. De quoi s’agit-il ? On parle d’indicateurs objectivables pour les plateaux techniques lourds : les volumes d’activité minimum, le taux de reprise chirurgicales, les infections nosocomiales, tout cela est balisé. Il existe aussi les IPAQSS [Indicateurs pour l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins]. Le Conseil national de la chirurgie a des propositions. Sans oublier les devis et les procédures d’accréditation qui engagent aussi bien les praticiens que les établissements. On n’a pas besoin de réinventer l’eau tiède. Demain, il y aura une proposition sur la table, établie conjointement avec l’assurance-maladie.
L’UNOCAM explique depuis le début qu’elle ne signera pas l’accord sur le secteur optionnel sans régulation parallèle du secteur II. Que proposerez-vous concrètement ?
Même si ces perspectives nous sont très sympathiques, on ne proposera pas comme condition sine qua non de fermer le secteur II ou d’arrêter les installations en secteur II dans certaines zones géographiques. En clair, nous n’exigeons pas aujourd’hui d’aller au bout de notre logique. Parce que nous voulons aboutir, nous proposons de fixer des objectifs précis en nombre de praticiens du secteur II rejoignant le secteur optionnel dans des délais rapprochés. Ce sera la condition. Mais si en deux ou trois ans nous n’avons pas abouti à une restructuration du secteur II vers le secteur optionnel, cela sera un échec et il ne faudra pas continuer.
Les usagers de santé sont inquiets. Pour le CISS, la création du secteur optionnel est un marché de dupes qui signifie l’augmentation de 50 % du tarif des consultations pour le plus grand nombre de Français…
Si le CISS a pour revendication la fermeture du secteur II, qu’il le dise ! C’est le moyen radical. Depuis 30 ans, on a un secteur à honoraires libres et plus aucun chirurgien ne s’installe en secteur I. En dénonçant le secteur optionnel, le CISS est à côté du sujet. Pour nous, si le secteur optionnel réussit, il a vocation à se substituer au secteur II.
Qui porterait la responsabilité d’un d’échec des négociations sur ce secteur dont on parle depuis 5 ans ?
Je ne vois rien qui ne soit pas acceptable par les syndicats de médecins. Jeudi, l’accord sera sur la table, à portée de la main. C’est le moment de vérité.
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