Sans surprise pour ceux qui l’avaient prophétiquement et malheureusement annoncée au début de la pandémie en 2020, la santé mentale de la population française et en particulier ses travailleurs, ne cesse de se dégrader. Inutile de rappeler les résultats des multiples études sérieuses sur le sujet : les constats sont accablants. Les entreprises et les salariés, regroupés ici sous le vocable « travailleurs », qui nous consultent en cabinet - d’avocat - ressentent et expriment aujourd’hui, « plus qu’hier mais moins que demain », des souffrances psychologiques sur fond du « quoi qu’il en coûte ». Qu’il s’agisse de cadres des ressources humaines, des équipes commerciales, ayant assumé les tâches de collègues en activité partielle, des salariés en activité partielle qui ne voient plus de sens à leur emploi, de dirigeant stressé et éprouvé par un sentiment de solitude, le mot « burn-out » revient régulièrement. Quel que soit le secteur d’activité avec une dominante dans le secteur de la santé, nous entendons également les mots « désengagement » et « pénurie de main-d’œuvre ». Une fois les constats effectués, que faisons-nous, collectivement et individuellement ?
Plutôt que de rester figés dans la peur et la colère – certes entretenues médiatiquement depuis des mois - nous avons évidemment les moyens d’agir et de saisir l’occasion qui nous est offerte d’améliorer le système et de progresser ensemble !
Hygiène numérique
Selon la mythologie grecque, le dieu de la médecine a eu deux filles : Panacée, déesse guérisseuse reliée au traitement médical et aux médicaments, et Hygie, déesse de la santé et de la propreté qui symbolise la prévention. La prévention est illustrée en droit du travail notamment sous l’article L4121-1 du code du travail selon lequel : « L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1° Des actions de prévention des risques professionnels ; 2° Des actions d'information et de formation ; 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ».
Texte central dans la construction normative et jurisprudentielle relative à l’obligation de sécurité de l’employeur, cet article constitue une mine d’or pour ceux qui se donnent la peine d’en faire, en amont, un outil de pilotage et de prévention des risques, notamment psycho-sociaux, dans l’environnement de travail. En aval, il permettra aux entreprises qui l’auront exploité de se défendre en cas de contentieux initiés au titre de harcèlement moral et/ou de reconnaissance de maladie professionnelle.
Du grec signifiant « qui contribue à la santé », Hygie a donné le mot hygiène et celle-ci peut être expérimentée de différentes façons. Des siècles d’évolution témoignent que l’humain s’est préoccupé de sa santé par l’hygiène corporelle, l’hygiène alimentaire et plus récemment par l’hygiène « numérique ».
Par hygiène numérique, comprenons qu’au-delà de l’hygiène informatique liée à la santé et la sécurité des systèmes d’information, les travailleurs doivent prendre conscience des bénéfices, notamment du droit à la déconnexion et du droit à la protection de la vie privée. Sous l’angle des devoirs, comprenons également qu’il s’agit de nous appliquer collectivement un devoir de vigilance sur la quantité et la qualité des communications numériques, notamment par une communication non violente et une diminution du volume de mails. Sur ce dernier point, l’intérêt environnemental (RSE) est souvent avancé pour soutenir les réductions de volume.
Les entreprises ont donc un intérêt à court, moyen et long terme à former les travailleurs sur ces sujets déterminants de la santé, quel que soit le secteur d’activité et quel que soit l’emploi occupé. Outre la formation professionnelle, l’entreprise pourra proposer aux salariés et à ses dirigeants des processus d’accompagnement par un coaching permettant notamment de définir et mettre en œuvre des objectifs par le développement de leur potentiel personnel et ce de façon durable.
Puisse la mythologie nous inspirer, nous faire agir, sans se prendre pour des dieux mais pour des humains que nous sommes, conscients de notre vulnérabilité, dont nous pouvons tirer tant de force.
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