Comment évaluer une personne pour laquelle est demandée une mesure de protection juridique ? Jusqu’à présent, les médecins n’avaient aucun texte pour les guider dans cette mission, ni aucune formation spécifique. Un manque qu’a souhaité combler, à la demande de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), la Haute Autorité de santé (HAS) en publiant une recommandation de bonnes pratiques.
Au 31 décembre 2023, 339 200 personnes bénéficiaient d’une mesure de tutelle et 372 400 d’une curatelle, selon le ministère de la justice. En comptant les personnes sous habilitation familiale, plus d’un million de Français seraient protégés, des chiffres qui augmentent avec le vieillissement de la population. Et qui recouvrent des réalités très différentes : personnes âgées, adultes en situation de handicap ou souffrant de problèmes de santé mentale, accidentés, etc. Dans plus de la moitié des cas (54,6 %), ces mesures sont confiées à un membre de la famille, puis, à 28 % à un service mandataire, et à 16,1 % à un mandataire privé, notamment un professionnel de santé.
Les médecins et équipes de soins retrouvent dans ces recommandations les grands principes de l’accompagnement d’une personne sous protection : respect des droits fondamentaux (vie privée, vie sociale, droit de vote, etc.) et de la dignité de la personne protégée ; respect des principes de subsidiarité, nécessité et proportionnalité de la mesure de protection ; importance de soutenir l’intérêt de la personne et de favoriser son autonomie. Sont également rappelées les étapes de la mesure de protection : anticipation, adhésion, évaluation de la situation, ouverture de la mesure, accompagnement, allègement ou fin de la mesure.
Existe-t-il une altération des facultés ? Empêche-t-elle l’expression de la volonté ?
Surtout, les médecins inscrits sur la liste du procureur de la République trouveront une fiche pratique, rédigée par des médecins et juristes, leur permettant d’évaluer au mieux la personne. En effet, l’établissement d’un certificat médical circonstancié réalisé par un médecin inscrit sur la liste du procureur est obligatoire. Mais son contenu est aujourd’hui « de qualité inégale d’un médecin à l’autre, tant dans sa motivation que dans sa forme », selon un rapport de 2016 du Défenseur des droits, cité par la HAS.
Le rôle du médecin inscrit est de dire si, du point de vue médical, il existe une altération des facultés mentales ou corporelles et, dans ce dernier cas, si cette altération empêche l’expression de la volonté. Il doit également en décrire les conséquences et l’évolution prévisible. Le juge rendra sa décision sur le besoin de protection en croisant le constat médical avec d’autres données.
La HAS recommande de s’adresser à un médecin dont la spécialité correspond a priori à la situation d’altération des facultés. Le médecin doit informer la personne de l’objet de sa mission et expliquer que la mesure de protection juridique n’est pas une sanction mais un moyen de préserver ses droits.
Ensuite la HAS insiste sur l’importance de respecter la confidentialité de l’examen et de demander le consentement de la personne pour l’accès à ses documents personnels (dossier médical). En cas de refus, le médecin inscrit peut se tourner vers le médecin traitant (au sens large et non seulement administratif) qui doit répondre à ses questions (mais pas fournir le dossier médical).
L’évaluation doit être contextualisée, c’est-à-dire réalisée au plus proche du cadre de vie et des besoins du quotidien. Et le certificat médical doit être individualisé, grâce aux conseils de rédaction fournis par la fiche HAS.
Le certificat médical doit être distingué des avis que le médecin inscrit peut y joindre (avis de non-audition, d’évolution non favorable de l’état de santé ou de non-retour à domicile), qui répondent à un cadre juridique distinct, y compris dans la déontologie médicale. Enfin, les médecins inscrits doivent respecter les tarifs définis par décret (160 euros en 2024 voire 192 selon la TVA, sans compter les frais de transport). « Pour certaines personnes, le coût du certificat médical circonstancié est un frein à la demande de mise en mesure de protection. Il convient de se renseigner localement, car certaines structures (notamment les services sociaux) peuvent participer à une prise en charge financière », lit-on.
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